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[FB] Deux Vieux ! Mots en folie !
Nils Gratz
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Deux vieux ! Mots en folie !


Nils avait eu droit à une belle permission. Depuis qu’il avait été en mission pour le gouvernement, il n’aspirait qu’à retrouver sa petite famille et quelle ne fut pas sa déception que de n’avoir pas eu le droit de quitter cette ile aux mœurs étrange. Un pavillon géant flottait au-dessus de la plus grande bâtisse de l’ile. Un « M » orthographié de façon particulièrement étrange et jaune sur un fond vert assez immonde. Cette ile n’avait qu’un seul slogan en mémoire : « venez comme vous êtes », et bon sang que les gens avaient pris ça au pied de la lettre !

Un nouveau passe-temps était devenu l’attraction de prédilection du grand-père. Chaque jours, il s’installait sur un banc et appréciait simplement la vue, et quelle vue ! Bien que la place principale ne soit pas bondée de monde, elle donnait directement sur l’entrée du clocher de la ville. Sur les côtés, un simple parc et quelques bâtisses résidentielles joliment décorées rendaient l’ensemble cohérent comme « petite ville tranquille ». Quelques échoppes et bars en tout genre… rien de bien transcendant au final mais c’est la population qui rendait le tout particulièrement atypique.

« Atypique » était le mot parfait pour décrire l’endroit, non pas par l’architecture mais par la faune qui peuplait l’ile. Du tout-venant, des personnes extravagantes, des physiques improbables… voilà ce qui excitait le grand-père. Pouvoir déblatérer toute la journée sur un accoutrement des plus immondes, commenter une bagarre de rue ou simplement râler sur les jeunes et leur énergie littéralement démentielle.

S’installant confortablement en posant sa faux en guise de repose-tête, le vieillard laissa alors aller ses yeux et se concentra sur ces individus louches. Soupirant d’aise devant un tel spectacle, il s’imaginait déjà en train de foutre des roustes à ces gamins qui s’en prenaient au bar, tentant de falsifier des documents sans aucun doute.

Il ne fallut guère de temps à l’ancêtre pour qu’un individu des plus louches ne traverse la place : Une tête de cheval sur un corps humain en train de manger une carotte. N’en croyant pas ses yeux, Nils se frotta alors le visage pour se demander s’il rêvait. Ce dernier était presque nu et ne portait qu’un pagne. Dans une chorégraphie des plus insolentes, il ne fit que traverser la place. Décidément, cette ile promettait de magiques rencontres que le gradé de la marine ne put s’empêcher de relever.


V’nez comme vous êtes… v’nez comme vous êtes… manquerait plus qu’une carotte géante se pointe en train de bouffer du cheval et on aura tout vu.
Le regard de Nils se posa alors interloqué sur un individu traversant la scène à son tour. L’image parfaite d’un homme sautant à cloche pied et mangeant un plat à même la rue. Tout orange, ce dernier semblait poursuivre le précédent. Nils se mit une gifle pour voir s’il ne prenait pas ses rêves pour des réalités et finalement, il constata que ce n’était qu’un simple gentilhomme avec un chapeau haut de forme à lire son journal.


Ah la mode !
Avec un soupir las, le vieillard continua ses remontrances sans se soucier de savoir s’il était seul ou non, entendu ou non.


De mon temps, on n’en faisait pas tout un plat !
Et c’était vrai ! Du temps du vieillard, les gens connaissaient les priorités.



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Mar 10 Oct - 11:52
Deux vieux! Mots en folie!


Quelle horrible journée. Plus sombre qu’à son habitude, le fossoyeur avançait en claudiquant, s’appuyant à chaque pas sur sa pelle en guise de canne, jurant à chaque pas lorsque l’outil se plantait dans le sol et qu’il devait l’en retirer pour continuer à avancer. C’est que la première chose qu’il ait faite ce matin-là, en se réveillant dans sa barque, avait été de se cogner le pied contre le bord de l’embarcation en tentant de l’enjamber, causant à son petit orteil droit une douleur qui le poursuivait encore maintenant.

Quelle horrible journée. Le soleil brillait bien fort dans le ciel, sans l’ombre d’un nuage à l’horizon. L’air alentour suintait la joie de vivre et la bonne humeur. Un chien teint en violet était passé devant lui en gambadant gaiement, lui rappelant plus encore sa souffrance. Comme si c’était nécessaire.

Quelle horrible journée. Et tout ça pour la passer dans cette ville qui transpirait par toutes ses pores le mauvais goût et l’exubérance. En une seule rue, il avait pu croiser une femme aux cheveux roses, dressés au-dessus de son crâne en une sorte de toque d’un demi-mètre ; un gros bonhomme à portant une longue cape composée de chiots vivants attachés entre eux et jappant joyeusement ; et comble du ridicule, un grand type maigre, nu sous un simple peignoir, et dont la tête était cachée par un large masque de hamster aux yeux exorbités et aux dents proéminentes. Qui pouvait sérieusement porter ce genre d’accoutrement ? Le temps d’arriver à la place principale, Chapter avait déjà mal aux yeux à force de les lever au ciel. Comme si son calvaire n’était déjà pas assez grand comme ça.

Quelle horrible journée. Arrivé au centre de la ville, il s’était dirigé en boitant vers l’un des bars, espérant se distraire un peu avec une petite choppe de bière qui l’occuperait bien une ou deux heures. Mais avant de pouvoir passer commande, il fut dépassé brusquement par quatre minuscules êtres assis sur les épaules les uns des autres, au son strident de la petite trompette dans laquelle soufflait celui du haut. Se résignant sur le fait que cette journée ne lui apporterait décidément rien de bon, il se détourna du comptoir en soufflant. Il lui restait peut-être l’une ou l’autre bouteille, quelque part dans une cave.

A présent, il s’était mis à la recherche d’un endroit où s’asseoir tranquillement, pour soulager quelques instants son pied endolori. Mais la tâche n’était pas aisée non plus. Tous les bancs qui bordaient la place étaient déjà occupés – et quels occupants. Ici, un jeune couple couvert des pieds à la tête de fleurs colorées, qui gloussait en se regardant dans les yeux. Là, un grand gaillard enserré dans du cuir noir luisant, couvert de clous argentés au niveau des épaules, des genoux et de l’entrejambe. Et là, une vieille chose rabougrie, tellement ridée qu’on ne parvenait même pas à distinguer son visage, avec une grande faux qui sortait de son crâne chauve.

Après plusieurs minutes de quasi-immobilité, à peser soigneusement le pour et le contre tandis que ses yeux parcouraient les différentes possibilités, le grand homme finit par se décider avec un soupir. Lentement, pieds et pelle traînant au sol, il s’approcha du banc sur lequel était assis le vieillard, et se posa sur le bord, droit comme un i et les mains sur les genoux, aussi éloigné que possible de celui-ci. La nuque crispée, il fixa son regard droit devant lui, évitant à tout prix de croiser celui de son colocataire du moment.

Le repos n’allait pas être de tout repos.



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Mer 18 Oct - 11:00



Deux vieux ! Mots en folie !


Décidément, ce n’était visiblement pas le bon jour pour le vieillard. A la base bien content d’être seul pour pouvoir râler sur la mode des jeunes, Nils ne s’attendait pas à ce que l’un de ces hurluberlus ne vienne dans sa direction.


Que ?
Avait-il parlé trop fort ? S’était-il attiré les foudres de l’homme en peluche ? Une goutte de sueur invisible perlait dans la nuque du vieillard qui ne savait pour le coup pas vraiment comment s’y prendre. Ne laissant rien transparaitre, la mouette ne suivit finalement même pas du regard la peluche géante.

Soupirant finalement discrètement, Nils fut pour le moins rassuré de constater qu’il ne s’installait qu’à l’autre bout du banc. Fermant les yeux comme pour reprendre son souffle, le vieillard soupira à nouveau discrètement avant de reprendre confiance en lui. Un nouveau challenger avait fait son apparition sur le banc et, contrairement à ce qu’il avait pensé au premier abord, ce dernier ne semblait pas lui en vouloir.

Un sourire en coin, l’ancêtre profita dès lors du silence pour tergiverser avec lui même. Sa seule question et son seul objectif : comment faire chier ce jeunot de la façon la plus perverse qu’il puisse être donné de faire ?

Son plan retord en tête, le Gratz échafaudait déjà mille et unes tactiques pour forcer son nouvel acolyte à quitter le banc qu’il s’était pourtant donné tant de mal à s’approprier. Soudainement, un ballon ovale vint percuter la jambe de Nils. Trois gamins sortirent de nulle part en courant vers l’ancêtre. Sorti de ses plans machiavéliques, le grand-père eut un regard noir pour les jeunots qui s’avançaient un peu plus lentement à présent.


‘Sont où vos parents ? C’comme ça qu’on vous éduque ? Sales mômes…
Nils n’était pas en colère et n’exultait pas de rage. Il ne faisait en réalité qu’énoncer des faits en direction des trois gamins. Histoire d’enfoncer un peu plus le clou, il attrapa le ballon qu’il garda avec lui. « Confisqué ! » avait-il alors dit avec un sourire en coin.


Vous feriez mieux de jouer à chat… de mon temps, on avait pas besoin de pastèque pour jouer ! Des bouts de bois nous suffisaient !
Laissant son regard sur le plus joufflu des trois, Nils ne put s’empêcher d’en rajouter un peu.


Et puis courir vous f’ra le plus grand bien… y en a qui auraient bien besoin d’un régime ! De mon temps, on pouvait pas être aussi gros que ça ! Une orange et c’était tout ! Voilà ce qu’on avait.
Avec un signe de la main des plus évocateurs, Nils congédia les trois bambins qui repartaient finalement plus lentement qu’ils n’étaient arrivés. Collant son vieux dos contre le dossier du banc, le grand-père fit « non » de la tête avant de soupirer longuement.


Sales gosses…
Se tournant finalement vers son voisin de banc, Nils imprima un regard encore plus désolé. Ne prêtant pas attention aux rides et totalement obnubilé par ce masque des plus étranges, le vieillard fit de nouveau un « non » de la tête avant de regarder droit devant lui pour pousser un nouveau soupir désapprobateur.


Faites des gosses qu'ils disaient…




je lance donc les hostilités ! Avec "Choupinou" ; "Encre" ; "Taxi" (Ouai, j'commence sympa ^^)

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Mer 25 Oct - 12:22
Deux vieux! Mots en folie!


Pendant un instant, les choses semblèrent bien se passer. Le fossoyeur s’était assis sans plus de complications, et continuait à fixer les hurluberlus qui évoluaient sur la place. Au bout de quelques secondes, il se permit donc de se relâcher un peu. Posant sa pelle contre le banc à côté de lui, il leva la jambe droite sur son genou gauche, pour commencer à masser distraitement son orteil.

Il fut sorti de son occupation si importante lorsqu’un objet sorti de nulle part percuta la vieille chose, qui sembla s’éveiller à ce moment-là. Reposant vivement son pied à terre et reprenant sa position crispée de départ, Chapter regarda du coin de l’œil « l’échange » entre l’être rabougri et les marmots qui s’étaient approchés, puis écouta les remarques du premier à mesure que les seconds s’en allaient.

-J’vous le fais pas dire...

Il avait marmonné ces quelques mots, bien plus pour lui-même que pour l’ancêtre, et ignorait si celui-ci les avait entendu. Bien que très certainement plus jeune de plusieurs décennies que son voisin, l’Eden pouvait parfaitement témoigner de la décadence des jeunes d’aujourd’hui. Et il le leur fit bien savoir, quand bien même ils étaient à présent bien loin pour entendre ses commentaires proférés à voix basse.

-Ma fille, à votre âge, elle avait déjà commencé à travailler depuis longtemps...

Lui aussi, d’ailleurs. Et son grand-père avant lui. Et sans doute même celui d’avant. Une belle tradition familiale, à laquelle la tragique mort de la gamine avait mis fin… Mais c’était probablement une bonne chose, au vu de ce qu’étaient les enfants de cette époque. L’état de la jeunesse actuelle faisait couler beaucoup d’encre dans les générations plus respectables, et ce n’était certainement pas pour rien.

-Et elle savait s’habiller correctement.

Secouant doucement la tête, il continuait de regarder les gamins s’éloigner. Le plus gros des trois, en marchant, continuait à regarder en arrière, vers son regretté ballon. C’est ainsi qu’il s’étala mollement à terre en trébuchant sur ce qu’il y avait devant lui, un minuscule cochon qui se terra avec une série de couinements stridents dans les jambes d’une toute petite dame fripée à la veste de velours rose bonbon au boutons verts brillants et au chapeau assorti arborant trois plumes presque aussi hautes qu’elle, qui s’appuyait sur une courte canne couverte de petits joyaux. Celle-ci commença alors à crier, d’une voix presque aussi aiguë que l’animal.

-Oh Seigneur, Choupinou ! Petit voyou!

Après un léger coup de canne sur les fesses qui fit retomber à terre le gamin occupé à se relever, et qui manqua de peu de lui faire elle-même perdre l’équilibre, la vieille dame souleva le petit animal de sa main libre pour l’embrasser sur le groin.

-Ne t’inquiète pas Choupinou, tout va bien aller ! Maman va t’amener chez le médecin!

Se tenant tant bien que mal debout, elle leva sa canne en l’air. Presque immédiatement, un jeune homme accourut, tirant derrière lui une petite charrette à bras sur laquelle trônait un canapé de cuir. Le garçon partageait le niveau de bon goût du reste des habitants de cette île ; son pantalon moulant était d’un jaune si vif qu’il en éblouissait presque le grand homme. Sa chemise était un damier de ce même jaune et de noir, et il portait une casquette dans les mêmes tons, au sommet de laquelle était perché un petit panneau affichant quatre lettres noires : TAXI.

Après avoir aidé la vieille dame à s’installer, son cochon toujours serré dans ses bras, le jeune homme reprit les barres de son engin et s’en alla en le tirant, quittant la place aussi prestement qu’il y était arrivé. Les deux gamins toujours debout le regardèrent s’éloigner en lui faisant des gestes obscènes, tandis que le troisième s’était assis et retenait visiblement à grand peine ses larmes en se tenant le coude, dont l’éraflure avait commencé à saigner légèrement.

Si en plus de devenir de plus en plus turbulents, les mômes devenaient de plus en plus fragiles, ou allait le monde ?

-A votre âge, on savait supporter un simple bobo, grommela le fossoyeur, tout en recommençant machinalement à se masser le pied d’une main.







Et je renvoie! Avec "Arène", "Confidentiel" et "Destituer"
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Jeu 26 Oct - 20:20



Deux vieux ! Mots en folie !


Particulièrement content, le vieillard ria. Non pas à gorge déployée, pour sûr, mais il ne put tout simplement pas se retenir lorsqu’il avait vu le grassouillet s’étaler tel un porc sur la grande place. Quel heureux hasard de voir son homonyme se ramener quelques secondes plus tard pour lui mettre une rouste.

Soupirant d’aise devant un tel spectacle, Nils ne perdit en réalité pas une miette de ce qu’avait pu raconter l’homme en peluche à côté de lui. Le vieillard s’était un peu éloigné de prime abord, allant jusqu’à manquer de tomber du banc. Après tout, une peluche qui parle, il y avait de quoi rendre fou un homme au point de le destituer de tous ses titres ! Même si le Gratz n’en possédait pas un seul, rien que de penser à cette idée lui fit froid dans le dos.

Reportant son attention sur l’arène au centre de la place où divers personnages refaisaient leur entrée et leur sortie, Nils se rassura avec les paroles de la peluche à côté. Visiblement, d’après ses dires, elle semblait bien plus proche de ce que pouvait représenter l’ancêtre que ce qu’il avait pu s’imaginer au premier coup d’œil.

Pourquoi un vieil homme aurait alors pris l’apparence d’un ours en peluche ? Sans compter qu’il avait dit que sa fille savait s’habiller correctement… osait-il ainsi se foutre de la gueule du vieillard à la faux ?! Nils fronça un peu les sourcils après cette réflexion. Observant un peu plus loin, il put voir un homme d’affaire porter sept mallettes : deux à chaque mains, une sous chaque bras et la dernière entre les cuisses. Le pauvre semblait également porter un Den Den Mushi sur son épaule et parlait relativement fort.

Une nouvelle fois, Nils soupira. Il ne savait pas vraiment comment réagir et quoi penser d’une telle situation. D’un côté, son cœur lui criait de rager devant un tel énergumène qui attaquait visiblement son espace vital, mais de l’autre, le vieillard masqué semblait lui tenir tête. En réalité, c’était un véritable bras de fer qui s’engagea entre Nils et sa propre conscience.

Soudainement, la mallette d’être les cuisses du jeune homme s’écrasa au sol et s’ouvrit en deux. Plusieurs dossiers volèrent sous le choc et au moins quatre d’entre eux portaient l’inscription « Confidentiel ». Cette vision eut un effet d’électrochoc pour le grand-père qui réalisa soudainement. Un infiltré ! Un génie du mal ! Quelle excellente idée !

Se détendant enfin, Nils ne put que se réjouir qu’un tel personnage soit assis à côté de lui. Le CCCCV, Comité des Clubs Cachés de Chiantise des Vieux, venait de prendre beaucoup d’ampleur et avait une recrue de choix. Souriant, il reprit ses aises pour se mettre dans un état d’esprit du club fermé et select qu’était ce CCCCV. Il ne restait plus qu’à profiter de la journée et faire connaissance. Observant le premier mal-habillé du coin, la journée commença sur les chapeaux de roues et Nils lança les premières hostilités.


Hey ! T’as pas honte ?! T’as pensé à ta mère quand tu as décidé de t’habiller comme les filles du bordel ?!
Mimant la fessée en direction de la jeune avec une jupe plutôt longue pour une fois malgré un gros décolleté, Nils cherchait simplement à s’assurer que son acolyte du jour était membre de ce club très fermé des papys râleurs.






C'est reparti avec "Cassoulet", "Radin(e)", "caresser" !

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Mar 7 Nov - 12:24
Deux vieux! Mots en folie!


Rien n’était plus naturel pour un être humain que le regret. Même quand il se trouvait être l’être humain en question. Tant d’actions pourtant si simples amenaient si souvent à des conséquences désastreuses, que le regret était peut-être le sentiment le plus répandu en ce monde. Tous ceux qui, un beau jour, avaient accepté dans une taverne le verre offert par un inconnu, avaient répondu positivement à une missive affichant «Il faut qu’on parle», ou s’étaient sentis l’âme d’un grand cuisinier et préparé une superbe cassoulet pour leurs compagnons de dortoir le savaient parfaitement – le regret était toujours bien vite arrivé.

Et en ce moment même, Chapter regrettait. D’être entré dans cette ville. De s’être assis sur ce banc. Et surtout, par dessus tout, d’avoir parlé. Car il n’en avait pas fallu plus que les quelques reproches que le fossoyeur avait marmonné pour lui-même, pour que la masse croulante à côté de lui ne se sente pousser des ailes et ne se ranime soudain d’une énergie surnaturelle. Visiblement fort amusé par la situation, le vieillard s’était pris au jeu. Le souci était en l’occurrence son manque total de discrétion et de tenue. L’Eden était un homme posé, qui aimait la tranquillité et la lenteur ; trois qualités dont la dernière intervention du vieux était à l’exact opposé.

C’est cela, et non le regard outré de la jeune femme incriminée, qui provoqua un toussotement dédaigneux chez l’ours, qui avait un instant cru trouver avec son voisin de banc un certain terrain d’entente. Mais démonstratif et bruyant comme il l’était, l’homme ne valait pas mieux que la jeunesse qu’ils s’accordaient à critiquer. Le fossoyeur se demanda un instant pourquoi il cherchait à se faire remarquer de la sorte. Quel était ce besoin étrange d’attirer l’attention ? Etait-ce une provocation envers lui, comme pour l’énerver volontairement ? Ou une sorte de défi qu’il lui lançait ? Ou peut-être était-il tout bonnement simplet au point de caresser l’espoir de gagner son amitié de cette façon ?

Dans un cas comme dans l’autre, Chapter n’était pas intéressé. Il avait depuis longtemps passé l’âge de ce genre d’enfantillages, et était bien trop radin en attention pour accorder la sienne à une démarche si ridicule… C’est du moins ce qu’il aimait se dire. Dans les faits, le vieillard l’avait légèrement irrité ; c’est qu’il tombait dans une mauvaise journée. Il lui fallait le punir. Mais il n’allait certainement pas tomber à son niveau.

Ce furent les passants de la place qui lui offrirent le moyen de le faire. En quelques secondes défilèrent en différents points non loin d’eux un grand homme barbu portant un hochet rose et une immense couche culotte, une femme d’âge moyen tenant une demi-douzaine de laisses au bout desquelles se chamaillaient autant de gamines tout juste assez grandes pour savoir marcher, et les amoureux transis du banc voisin, qui avaient fini par se lever et s’éloignaient à présent tout en se tenant les mains et en frottant leurs nez l’un contre l’autre, sans réellement regarder où ils allaient. Les gamins dont la balle avait été confisquée, quant à eux, était toujours au même endroit, et discutaient entre eux en jetant des regards noirs dans leur direction.

Sous son masque, le fossoyeur ut un demi-sourire. Il voyait deux possibilités : soit le vieillard souhaitait jouer une sorte de ping-pong et attendait qu’il réplique à son tour, auquel cas il pourrait attendre encore un moment – l’Eden ne prononçait plus un mot, et finirait au bout de quelques secondes par tourner la tête vers son homologue et le fixer, immobile et silencieux, pour accentuer la gêne de la situation – soit, au contraire, le vieillard réagirait lui-même à l’un ou l’autre des farfelus habitants de la ville ; si tel était le cas, le grand homme prévoyait d’attendre la fin de sa tirade avant de soupirer, et de se lever lentement en reprenant sa pelle et faisant mine de partir. Quelque soit l’intention de l’homme à son sujet, elle tombait à l’eau si le fossoyeur ne collaborait pas – et de facto, celui-ci gagnait.

Quelle que soit l’évolution des choses, Chapter les observerait attentivement. Sur le côté de son masque, il ouvrit une minuscule fenêtre, pratiquement invisible de l’extérieur, et commença à travers celle-ci une analyse minutieuse des réactions de celui qui était devenu son opposant. Une attention particulièrement rare, pour lui ; l’ancêtre pourrait au moins se targuer de cela.







Et ce sera donc "Léthargie", "Fictif.ve" et "Illuminer" !
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Jeu 16 Nov - 12:11



Deux vieux ! Mots en folie !


Il connaissait le code ! L’ours connaissait le code ! Le toussotement dédaigneux de son comparse de banc était indubitablement le signe que, malgré l’apparente léthargie dont il faisait preuve, il appartenait au club ! Nils se sentit ragaillardi : son cœur ne fit finalement qu’un bon lorsque le code fut donné. Un jour viendrait, il faudrait tout de même penser à le changer ce code… bien trop anodin : tout le monde risquait de comprendre la supercherie.

Se réinstallant ostensiblement sur le banc pour prendre une pose bien moins confortable mais particulièrement fière, le vieillard attendit un second signe. N’importe lequel tandis qu’une famille particulièrement étrange passait sur la place. Il y avait pourtant de quoi faire ! De son temps, on ne traitait pas les jeunes enfants de cette manière ! Allez… juste un petit effort !

Finalement rien ne vint. Pas même l’ombre d’une réaction devant cette scène pourtant burlesque qui méritait bien de se faire remarquer et de faire tout autant remarquer la population qu’elle était sur le mauvais chemin ! Une scène fictive avait pris place dans l’esprit du vieillard qui avait pourtant plus d’une dizaine de répliques et d’actions en tête. C’en devenait presque une drogue… il fallait que ça sorte !

Toujours rien ? Plusieurs secondes passèrent et le grand-père commença à s’impatienter. Etait-il en manque d’inspiration ? Décidément… rien ne se passait comme prévu ! Soudain, alors qu’il allait éclater, l’ancêtre comprit ! C’était pourtant évident ! Nils n’avait pas répondu au code et l’ourson tentait évidemment de se couvrir « au cas où » ! Reprenant une pose un peu plus confortable, le vieillard prit un air solennel pour entonner la phrase qui prouverait qu’il était du même camp que son comparse du jour.


Le bois aboie quand je bois...
Tournant derechef son regard vers son comparse, il observa la réaction de son comparse afin de voir si une lumière s’était illuminée dans son cerveau. La seconde d’après, il se détourna pour ne pas paraître trop suspect… trop tard. Afin de lui montrer sa bonne volonté, il entama une nouvelle fois les hostilités envers cette passante bien trop jeune pour avoir autant de gosses.


Tout ça pour les allocs hein ! De mon temps, on savait mériter sa paye !
Et paf ! C’était bien envoyé ça. Les regards se tournèrent une nouvelle fois vers Nils et l’ourson. Si ce dernier partait après son soupir, Nils en profiterait pour attendre quelques secondes avant de le suivre : c’était nécessairement qu’il avait quelque chose de plus intéressant à lui montrer. Comment pouvait-il en être autrement après tout ! Les deux comparses du jour faisaient parti du même club de chiantise pour vieux. Cette journée risquait de réserver bien des surprises.





Course poursuite entre deux vieux si tu gardes le fait que tu t'en vas Very Happy J'aime !

On repart avec "Mériter", "Escargot" et "Soudain" ! Je change pour mettre un peu de péripétie...

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Sam 2 Déc - 11:20
Deux vieux! Mots en folie!

Lorsque le vieillard prit enfin la parole, le fossoyeur retint difficilement un ricanement : sa stratégie avait fonctionné ! Le vieil homme, ne supportant pas son manque de réaction, avait craqué. Son esprit l’avait lâché, il commençait à aligner des mots sans la moindre cohérence. Comme il se devait, l’ours venait de gagner bien facilement cette terrible guerre psychologique.

Satisfait, il s’adossa plus confortablement sur son banc. Il envisagea même d’aller chercher une bouteille dans l’une des caves du château pour savourer correctement cette glorieuse victoire… l’espace de quelques instants seulement.

Car l’amas de peau ridée n’avait apparemment pas dit son dernier mot : il s’était ressaisi plus vite qu’il n’aurait dû, et revint soudain à la charge, ressuscitant par miracle le peu d’esprit que les années lui avait laissé. Il souhaitait visiblement mener à terme un combat dont le vainqueur était pourtant parfaitement évident.

Et bien, s’il tenait réellement à se faire écraser plus encore, Chapter ne l’en empêcherait pas et ne ferait preuve d’aucune pitié. Il avait le dessus et ne ferait pas l’erreur de le perdre. Son sens de la stratégie s’était déjà avéré payant et continuerait de le faire ; il s’en tiendrait donc à ce qu’il avait prévu, ce qui serait entièrement suffisant pour terrasser son adversaire une bonne fois pour toutes… et lui faire passer cet esprit compétitif enfantin si ridicule. Comment pouvait-on avoir à ce point besoin de se mesurer à des inconnus pour prouver une quelconque supériorité ? C’était lamentable. Le vieillard ne méritait vraiment pas toute l’attention qu’il lui accordait. Mais l’ours lui ferait retenir la leçon.

Après son soupir, il se leva donc difficilement, s’appuyant sur sa pelle, et fit mine de s’éloigner d’un pas exagérément lent, même pour lui. Un instant de panique lorsqu’il constata depuis son poste d’observation le manque de réaction du vieil homme. Pourquoi ne faisait-il rien pour l’arrêter ? Pourquoi ne disait-il rien ? L’ours l’avait-il sous-estimé ? L’homme avait-il compris son stratagème ? Non, impossible, il était simplement trop lent pour réagir ; à moins que… cachait-il si bien son jeu ?

Tendu, hésitant sur la marche à suivre, le fossoyeur ralentit plus encore son pas d’escargot ; en un autre temps, en un autre monde, d’aucuns auraient pu faire le parallèle avec un slow-mo mal imité.

Un soupir de soulagement parcourut donc tout son corps lorsqu’il vit à travers sa meurtrière l’ancêtre se lever à son tour, lui emboîtant le pas. Il n’accéléra cependant pas sa marche ; son poursuivant devrait bien se plier à sa cadence, s’il désirait poursuivre la lutte. Une lutte qui serait à présent rythmée au son régulier de leurs pas sur le petit gravier de la place ; pied gauche – pied droit – pelle – pied gauche – pied droit – pelle.

Il entama le chemin qui l’avait vu arriver, en sens inverse. Arrivant au centre de la place, il passa près des bambins sans ballon, qui les regardèrent approcher avec un mélange de haine et de peur. Il les dépassa sans même leur accorder un coup d’œil, s’intéressant plutôt à la réaction de son adversaire du jour lorsqu’il arriverait à leur hauteur quelques instants plus tard.

Bien trop sûr de lui, il se permit de marmonner sous son masque avec un petit rire satisfait, ignorant si son entourage pouvait l’entendre :

-Ah… Tu te crois fort vieil homme ? Tu te crois borné ? Tu ne sais pas sur qui tu es tombé...







Et on poursuit la course avec "Implicite", "Estomaquer" et "Racine"!

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"Avant moi rien n'était, nul ne fut enfanté,
Hors les êtres crées d'éternelle substance,
Et moi je suis comme eux, car j'ai l'éternité,
Vous qui passez le seuil, laissez toute espérance."

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Lun 4 Déc - 17:58



Deux vieux ! Mots en folie !



Quel talent ! Quelle magnifique et splendide démonstration se jouait ainsi devant les yeux du docteur Gratz ! Cette lenteur, parfaitement caractéristique de ce que le club avait coutume de faire. La règle était souvent de bloquer les files d’attentes ou bien les passages bondés pour éviter que quiconque puisse se rendre d’un point A à un point B. Cependant, les règles du jeu avaient souvent été détournées pour permettre aux plus grands maitres de se distinguer. Le concours implicite qu’avait engendrer ces différentes règles éthiques du vieillard provoqua une véritable admiration de Nils envers l’ourson. C’était un expert. Indéniablement.

Pied gauche – Pied droit – Faux – Pied gauche – Pied droit – Faux.

« Il a beaucoup de choses à m’apprendre » pensa alors Nils qui pourrait ne jamais tarir d’éloges devant un tel personnage. Pas peu fier de l’entrainement qu’il avait pourtant mis au point depuis des années lui aussi, le vieillard, certes incapable d’aller aussi lentement que son homologue ancestral, avait un seul et unique projet qui risquait d’estomaquer l’ourson.

En effet, Nils n’avait jamais vraiment su parfaire sa marche lente. Ses rhumatismes avaient souvent repris le dessus et lui avaient souvent provoqué, soit un arrêt brutal tout court, soit une rapidité hors norme pour tenter de se débarrasser de sa douleur. Non, son véritable talent à lui, c’était la crise cardiaque. La fausse… bien évidemment… pour le plus grand malheur de bon nombre de personnes malheureusement.

Pied gauche – Pied droit – Faux – Pied gauche – Pied droit – Faux.

Nils rattrapa bien trop vite l’ours malgré la lenteur qu’il mettait à l’ouvrage. IL n’avait plus le choix. Passant proche du SBF, sans ballon fixe, Nils continua sa marche bien trop rapide…

Pied gauche – Pied droit…

La faux fit une embardée et tomba au sol dans un brouhaha assez monumental. Ayant presque rattrapé l’ourson, on aurait pu croire que c’était à son contact que le vieillard de Nils avait fait son attaque. Les pieds joints, la main sur le cœur… et la chute à la renverse dans un moment presque figé par la mort. Le « slow-mo » de l’ourson rendant la scène particulièrement lente, comme agonisante pour le vieillard.

La chute de Nils fut spectaculaire. Pris de soubresauts, le vieillard gardait néanmoins un œil semi-ouvert pour vérifier à quel point il avait pu impressionner son maitre. « Ok, t’es peut être lent, mais je suis un fou moi ! » pensa alors le vieillard. S’arrêtant finalement, le temps comme suspendu, seule une brise vint caresser les cheveux de l’ancêtre.

Personne n’aurait pu dire combien de temps il était resté là. Une minute, dix minutes… des jours ? Le temps ainsi figé, Nils aurait pu prendre racine dans le sol tellement son déguisement était parfait. Les yeux grands ouverts fixant l’ours, il ne restait visiblement plus qu’à l’enterrer.

Si jamais l’ourson décidait d’abandonner le vieil homme à son sort, alors le grand-père se relèverait comme si de rien n’était ou presque. Après tout : Nils était un être immortel, non ?





Oseras tu abandonner un vieux comme ça ? Un tel "Jedi" des temps "Modernes"... sois beau, grand et fort mon petit ours "brin" ! Very Happy

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Sam 16 Déc - 10:58
Deux vieux! Mots en folie!

Le vieil homme ne fit même pas semblant de regarder ailleurs, de ne pas le suivre volontairement, comme la bienséance l’aurait voulu. Il lui emboîta le pas tel un caneton tout juste éclos. Il ne lui céda cependant pas tout. Alors que l’Eden, pied gauche – pied droit – pelle, avait espéré imposer son rythme, et par la même occasion sa dominance, le vieillard lui, pied gauche – pied droit – faux, ne l’entendait visiblement pas de cette oreille. La cadence à laquelle il décrivait ce schéma récurent était bien différente de celle du fossoyeur. En effet, il se croyait fort.

Son poursuivant ne tarda donc pas à le rattraper, allant même jusqu’à le coller de près au bout de quelques mètres seulement. Chapter devait bien l’admettre, l’homme avait également quelques tours dans son sac. A se faire serrer de la sorte, il avait presque envie d’accélérer le pas, fuir l’oppression de cet ancêtre trop insistant ; il ne le fit pas. Il n’allait certainement pas offrir cette petite victoire à son opposant, qui même sans ça, s’accrochait déjà bien trop à la compétition qu’il avait lancée.

Sentit-il cet instant de faiblesse ou non, l’ours n’en sut rien ; toujours est-il que la réaction, peu importe comment elle était justifiée dans l’esprit du grand-père, sembla démesurée: le fossoyeur dut faire un pas de côté précipité pour éviter la faux qui avait été lancée dans sa direction, et qui s’étala au sol au point précis où il s’était trouvé un instant plus tôt.

Il lança un regard outré au vieil homme, scandalisé par la violence et la fourberie de cette attaque. Lui qui ne menait qu’une petite compétition bon enfant entre deux gentlemen modernes et civilisés, voilà qu’il se retrouvait agressé de la plus basse des façons ! Le ridé avait dépassé toutes les limites de l’honneur. Il se préparait à lui dire ses quatre vérités…

Et sa phrase mourut dans sa gorge, sa mâchoire s’immobilisant alors qu’il comprenait ce qu’il se passait. Peut-être y avait-il été un brin trop fort. Il aurait dû se douter qu’à cet âge, l’aileul ne pourrait pas tenir bien longtemps le stress intense d’une lutte mentale avec lui. Peut-être aurait-il dû le ménager un peu, mettre de côté sa fierté personnelle un instant. Quelle gloire y avait-il de toute façon à triompher d’une personne qui parvenait à peine à soutenir son propre poids ? Dont l’esprit était sans doute revenu à l’état larvaire depuis bien longtemps ? Aucune, c’était certain.

Mais il était trop tard, et il ne pouvait rien faire. Les bras ballants, sa pelle plantée droite à côté de lui, l’ours observa longuement les convulsions effrénées du grand-père, attendant que tout cela se termine, pour pouvoir faire ce qu’il faisait le mieux. Il avait toujours été bien plus doué avec les morts qu’avec les vivants, de toute façon. Il en avait encore la preuve aujourd’hui ; ses réactions entraînaient la mort d’un pauvre homme qui ne voulait au final sans doute rien d’autre qu’animer un peu son morne quotidien. Qui sait combien de jours, semaines, années il avait passées sur ce banc, cherchant désespérément à attirer quelques secondes d’attention en alpaguant les passants ? C’était en tout cas là le dernier. Chapter poussa un long soupir désolé ; ce n’était pas grave, non. La mort ne l’émouvait plus depuis bien longtemps. Ce n’était après tout qu’une étape comme les autres, que les gens redoutaient pour une raison obscure. Mais malgré cela, il se sentit navré pour le vieillard ; était-il prêt à passer de l’autre côté ? Probablement pas. Au moins pourrait-il trouver un peu de soulagement dans l’idée qu’il était parti en s’amusant, ou au moins en se remuant, plutôt que tristement affalé sur son banc, là où personne n’aurait peut-être remarqué sa mort avant des jours.

Les soubresauts s’arrêtèrent enfin, alors que le vieil homme acceptait sa destinée. Il resta figé là, yeux grand ouverts, comme s’il attendait encore quelque chose du ciel. Le fossoyeur ignorait ce que cela pouvait être, mais il l’aiderait à l’obtenir. C’était cela, son rôle ; tel un jedi de l’outremonde, il guidait les défunts vers la voie de la paix et de la sérénité. Les différents d’ici-bas n’avaient plus d’importance, une fois le seuil franchi. L’esprit avait besoin de repos, et son travail était de le lui accorder. La première étape pour cela était l’honneur accordé au corps ; une sépulture à la hauteur de l’homme qu’il avait été permettait à l’esprit de s’en aller sans regret ; mais cela impliquait de connaître un tant soit peu le défunt, faute de quoi il aurait du mal à lui offrir des funérailles adaptées. Il ne faisait pas le plus facile des métiers, non.

Lentement, précautionneusement, il s’accroupit aux côtés de la dépouille. Puis, avec une douceur infinie, il posa l’index et le majeur sur les paupières de l’homme, pour les refermer délicatement tout en fredonnant à voix très basse un air funéraire. Lorsqu’il prit la parole, ce fut également avec une grande tendresse et dans un quasi-chuchotement, ne voulant pas troubler l’esprit fraîchement parti.

-Qui étais-tu, vieil homme ? Qu’as-tu accompli, qu’as-tu traversé durant ta longue existence?







Trop d'émotion :'( "Rugissement", "Reproducteur" et "Amouracher" seront dans la suite!
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Dim 17 Déc - 11:30



Deux vieux ! Mots en folie !



La scène s’était déroulée au ralenti. Un homme avec une tête d’ourson s’approchant peu à peu d’un vieillard qui venait de rendre son dernier souffle. Une scène particulièrement touchante qui eut le don d’attirer bon nombre de passants excentriques. Des visages tristes commencèrent à apparaître et déjà quelques personnes retiraient leur chapeau en guise de respect pour le défunt. Des personnes aux larmes particulières allant contre la gravité se mirent également à gémir et à pousser des rugissements dignes des plus grand mélodrames de ce monde.

Les yeux alors fermés de façon aussi inexpressives que possible, Nils ne bougeait pas d’un pouce ou d’un iota. Formé au mieux à la crise cardiaque, le vioque était en train de réaliser sa pièce maitresse. « Ne plus respirer » se disait-il alors à outrance pour lui même.

Ce ne fut que lorsque la question fut posée à voix haute que bien des membres de la communauté acquiescèrent en silence. Le dur labeur du fossoyeur allait devoir commencer. Le vieillard était au bord de la fin en réalité : devoir retenir ainsi sa respiration commençait à vraiment peser sur l’ancêtre qui n’avait pas prévu de rester aussi longtemps sans être privé d’oxygène. Virant au bleu, le docteur Gratz explosa finalement en se redressant finalement.

La question ultime avait été posée. S’agissait-il d’un éloge funèbre fait pour lui même ? Dans tous les cas, Nils commença à parler… longtemps… longuement… éternellement. Les gens qui avaient initialement pensé que quelqu’un était en train de répondre à ce qu’avait posé comme question ne réalisèrent pas de suite que c’était le mort qui parlait. Trop tard, un cri suraigu d’une dame qui venait de réaliser provoqua un mouvement de panique et alors que Nils était en train de vanter les talents de reproducteur de son fils en évoquant ses trois petits-enfants, un coup de pied magistral vint le saisir dans le ventre. Une seconde à peine plus tard, c’est une poêle qui s’abattit sur sa tête. Divers objets allaient bientôt commencer à pleuvoir sur le vieillard qui allait sans doute s’en prendre plein la tête.

Bien vite, toutes les personnes autours de l’ancêtre virent leur amour haché par l’ancêtre et son comportement inadmissible. Pire encore, si rien n’était fait, le grand-père Gratz risquait véritablement de passer l’arme à gauche ! Bien que les habitants de l’ile aient été les premiers à être des plus excentriques, à porter des chapeaux ridicules ou encore à se plaire à des coutumes loufoques, voir un mort se relever… non : ce n’était pas possible.

L’ourson laisserait-il faire cela ? Après tout… d’après Nils, c’était un collègue de toujours, sans doute l’un des plus expérimentés… en tant que vieux chieur, il n’était pas possible de se faire abandonner, si ?





C'était si beau... que de mélodrame ! La suite avec "remède", "retraite" et "reboucher" !

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Ven 22 Déc - 22:47
Deux Vieux ! Mots en folie !



Le fossoyeur sentit un relent d’émotion crue remonter sa gorge, lorsque l’attroupement se forma ; ainsi donc, malgré toutes leurs insupportables excentricités, les habitants de cette île avaient encore un restant de sens commun, et savaient quand il était temps de mettre leurs bouffonneries de côté pour honorer comme il se devait le défunt. Même les plus jeunes, qui lui posaient tant de mal en temps normal, semblaient connaître les priorités nécessaires à tout être humain. C’était là quelque chose de beau, quelque chose de grand. Un instant de pure communion entre des âmes pourtant si différentes. Il se souvint alors pourquoi il aimait tant son métier, même s’il était difficile. Il ne l’aurait échangé contre aucun autre.

Il lança un dernier regard à l’homme allongé, qui changeait de couleur à vue d’œil. Jamais il n’avait vu un corps refroidir si vite ; celui-là avait vraiment atteint ses limites, dépassé plus que de raison le temps qui lui avait été imparti en ce monde. Son départ ne s’était que trop fait attendre. Ce n’était donc pas une coïncidence qu’il se fasse à l’instant précis de leur rencontre ; c’était que l’esprit du vieillard ne cherchait que la bonne personne pour s’occuper de toute l’organisation autour de son dernier voyage. L’Eden était quelque peu honoré d’être cette personne. De mémoire de fossoyeur, c’était la première fois que quelqu’un faisait un tel effort de survie pour s’assurer que ce soit bien lui qui s’occuperait de ses propres funérailles. Le moment était donc important, pour lui aussi.

Il avait commencé à se relever doucement, mais son mouvement se fut plus brusque que prévu, lorsque le cadavre se redressa. Son poing se ferma instinctivement sur le manche de la pelle. Il se détendit cependant légèrement lorsqu’il commença à parler. Le vieil homme avait là une dernière mission : aider Chapter à l’aider à partir. Un tel dévouement, c’était à la fois beau et inquiétant. Il était prêt à aller à l’encontre de ses lois les plus primordiales, rester ici-bas quelques minutes de plus, pour s’assurer que tout se passerait comme il le fallait. Une fois de plus, jamais l’ours n’avait vu un mort faire preuve d’autant d’audace et de ténacité. Cet homme était bel et bien exceptionnel.

Il l’écoutait donc attentivement, avalant avidement la moindre de ses paroles, à la recherche de ce qui rendait si unique ce simple fermier à la famille prolifique… Mais cela ne vint pas. Un homme vint frapper le vieillard pour le ramener à terre avant qu’il n’ait le temps d’y venir. Rapidement, les attaques se mirent à pleuvoir sur le cadavre ambulant.

Chapter comprit immédiatement le problème. Tous ces gens pensaient que l’ancêtre refusait son sort. Ils croyaient que celui-ci voulait fuir la mort plus longtemps encore, nier la réalité, continuer à se balader dans le monde des vivants, comme si de rien n’était. Une interprétation compréhensible, au vu de l’entêtement dont faisait preuve le barbu. Et en bons samaritains qu’ils étaient, ils voulaient empêcher cela. Forcer le vieil homme à s’en aller, à prendre son ultime retraite, pour le bien de son âme. Tout cela était si beau ; l’Eden leur en fut reconnaissant. Seulement, ils se trompaient.

-Attendez, attendez ! Vous ne comprenez pas!

Attrapant son outil de travail à deux mains, il frappa du plat de celui-ci une lourde botte de cuir qui volait en direction de la tête chauve, la renvoyant dans le public.

Car aussi bien intentionnés soient-ils, ces braves gens n’adoptaient pas la bonne réaction. Le vieillard ne refusait pas le trépas ; pourquoi l’aurait-il attendu, si ça avait été le cas ? Non, il ne faisait que répondre à son interrogation, désireux de le soulager dans sa lourde tâche, afin qu’il puisse s’en montrer digne. Et dès qu’il aurait fini de conter son histoire, dès qu’il en serait arrivé à cet événement incroyable qui justifiait une mort si incroyable, il s’en repartirait, Chapter en était convaincu. Il pourrait alors reboucher le gouffre béant qu’il semblait y avoir dans le destin de cet homme. Il serait la dernière pierre dans l’édifice d’une vie extraordinaire.

Tous ces gens faisaient de l’excès de zèle, et risquaient de ruiner ce rite complexe et subtil. Il ne pouvait pas laisser faire ça. Levant le bras gauche vers le ciel d’un geste sec, il ouvrit une fine trappe sur la paume de sa main. Une détonation violente se fit entendre, stoppant net les cris de la foule. Les lancers d’objets divers s’arrêtèrent eux aussi, tandis que les badauds se regardaient avec hésitation.

Se tournant à nouveau vers le corps presque sans vie, il l’invita à continuer son histoire, certain que ceux qui les entouraient le laisseraient faire, à présent. Et s’il s’avérait que la masse avait raison, s’il se trompait sur le compte du vieux, si celui-ci décidait de s’entêter à rester après avoir terminé sa narration… Eh bien, le fossoyeur avait le remède à cela. Un oreiller de plume attendait sagement dans sa chambre à coucher, prêt à se lover tendrement sur le visage poilu du grand-père, et à l’aider à faire ses adieux à ce monde une bonne fois pour toutes.

Tout allait si bien se passer… Si l’attroupement populaire ne décidait pas après ses quelques secondes de stupeur de le prendre pour cible lui aussi. Quant à savoir où et quand le boulet de canon qu'il avait tiré allait retomber, c'était là une toute autre problématique.






A la fin, j'ai pleuré. J'veux en voir plus! "Pizzaiolo", "Esthétique" et "Contrepoids"
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Mar 2 Jan - 11:20



Deux vieux ! Mots en folie !



Un duo hors du commun. Visiblement, l’attente de l’ourson était évidente : Nils, en plus de sa crise cardiaque, devait maintenant utiliser son second meilleur don, celui de conteur. C’était désormais une évidence : le Chapter était un maître dans la chiantise pour les pauvres jeunes âmes. Le coup de canon retentit alors et c’était visiblement le signal : bien que surpris, Nils prit sa respiration pour commencer son bien long récit.


Tout commença en 1422, année où mon père rencontra ma mère…
Il était nécessaire de faire honneur à son homologue du jour ! Habituellement son récit commençait à sa naissance mais aujourd’hui, il était nécessaire de reprendre bien plus loin encore. Il fallait reprendre au commencement de toutes choses… ça allait être long. Terriblement long.

Nils passa bien cinq à six minutes à présenter qui étaient ses parents ainsi que les seize raisons qui les avaient poussés à se mettre ensemble et à avoir un bambin. Histoire de faire profiter le reste de l’assemblée, le vieillard profitait de l’instant pour instaurer quelques éléments de l’ile pour rendre le tout naturel. Le côté Pizzaiolo de son père provenait du moustachu habillé en rouge à sa droite qui semblait drogué à l’extasie. Le pauvre essayait vainement d’utiliser sa casquette comme un boomerang. Même Nils avait bloqué sur la scène ! Cependant, il secoua bien vite des esprits pour reprendre le récit de son père fermier et de sa mère chirurgienne esthétique. Il devenait nécessaire de prendre son temps pour bien expliquer les raisons de cette rencontre improbable.


Sans compter que mon père n’aimait pas vraiment le verni… ni la ville en fait parce que figurez vous que ma mère ne mettait que du rouge… quoiqu’un peu de vert également parfois…
Certains badauds avaient profité du fait qu’ils n’étaient pas au plus près de la foule pour s’éclipser discrètement. Ce vieux ne voulait pas crever… c’était indéniable et terriblement triste pour le coup car les plus proches semblaient comme « happés » par une aura magnétique autour du vieillard : par respect et par égard à ce qu’il s’était passé auparavant, ils ne se sentaient pas en droit de quitter a scène. Cette histoire serait le supplice des pauvres hommes de ce monde ! Nils en aurait presque ri.

Un sifflement lointain semblait se rapprocher peu à peu tandis que l’ancêtre arrivait à la fin. Bougeant plus que de raison, Nils semblait bien plus vivant qu’il n’avait pu sembler l’être au début de son récit. Reprenant peu à peu des couleurs, son visage et son euphorie laissaient penser à bien des années encore de vie. Terrible nouvelle pour les passants qui pensaient quant à eux que plus le temps du vieillard augmentait, plus le leur diminuait. Quelle sensation terrible que de sentir sa propre vie filer : Nils était une faucheuse d’âme, il n’y avait aucun doute possible là-dessus.

BANG

La surprise fut totale. Le boulet de canon surprit tous les badauds lorsqu’il s’écrasa sur les pieds d’un Nils encore assis. Le choc provoqua un contrepoids total qui fit se relever l’ancêtre et, dans un mouvement de balancier alors qu’il allait enfin commencer l’histoire de sa propre vie, le grand-père percuta le sol de sa tête de plein fouet. Le coup le sonna complètement… était-il mort ? Sans doute non, toujours était-il qu’il ne semblait pas spécialement vivant après un tel choc !






Je suis maintenant ta chose ! C'est tellement beau ! "Enterrement", "pioche" et "canon" seront les maitres mots du prochain post !

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Jeu 18 Jan - 12:26
Deux vieux ! Mots en folie !



La chute et l’impact du boulet furent le signal tant attendu, pour lui comme pour l’âme du vieillard. Il avait passé les dernières minutes à écouter l’homme en silence, ponctuant chacune de ses phrases par un hochement de tête approbateur, et fustigeant de temps à autre d’un regard noir les quelques badauds qui faisaient causette en chuchotant, refusant au grand-père l’attention qu’il méritait amplement. Puis, lorsque l’Univers signala à l’aïeul que son temps était écoulé, celui-ci accepta comme supposé son sort sans broncher. Un regard doux se porta sur la carcasse. Le fossoyeur avait maintenant tout ce dont il avait besoin ; il lui avait suffi de remarquer que le vieil homme, se moquant de tous les canons en la matière, n’avait à aucun moment évoqué sa propre personne lorsqu’il avait dû résumer son existence. Ce qui expliquait pourquoi il s’était forcé à se maintenir en ce bas-monde aussi longtemps que nécessaire. Une telle abnégation, un tel dévouement à sa famille, il y avait de quoi impressionner plus d’un homme ; même l’Eden, qui avait pourtant été un père exemplaire à bien des égards, ne pouvait se vanter de cette prouesse.

Après quelques secondes de silence, nécessaires à chacun pour prendre mesure de la fin attendue du grand-père, Chapter se racla doucement la gorge avant de prendre la parole, droit comme un I, ses deux mains ancrées sur le manche de sa pelle.

-Braves gens, nous sommes réunis aujourd’hui pour accompagner dans son dernier voyage un homme parfaitement unique. Un homme simple et juste, qui connaissait le vrai poids de ses priorités. Un homme qui n’avait qu’une seule valeur fondamentale, et qui...

Il s’interrompit au son d’un choc sec et d’un grognement étouffé. Il tourna lentement la tête, pour découvrir un homme moustachu qui venait de s’étaler à terre, ses bras tendus s’arrêtant à une dizaine de centimètres d’une casquette rouge vif. Tiquant de la langue, il s’en revint à son discours, plus hésitant.

-Un homme qui considérait sa famille comme sa plus grande fierté, et qui voyait ses petits-enfants comme une...

La visière d’une casquette frappa de plein fouet l’oeil rond et globuleux de l’ours, tandis qu’à sa droite se faisait entendre un petit « Oh, pardon ».

-Et, hum, s’il est venu aujourd’hui le jour de lui dire adieu, et si, hum, si son âme a fait le choix de...

Il s’arrêta une fois de plus, fixant d’un air sévère le gamin brun qui se faufilait entre les badauds pour tenter de récupérer plus ou moins discrètement le ballon qui gisait à présent aux pieds de l’ours. Excédé, Chapter retourna son outil de travail d’un geste vif, et le bout du manche heurta rudement le front de l’enfant, y laissant une trace ronde bien démarquée. Peu de choses étaient en mesure d’énerver le fossoyeur d’habitude si calme, mais l’irrespect pour ces moments sacrés lui semblait absolument inacceptable. Finalement, les habitants de l’île confirmaient la première impression qu’ils lui avaient laissé. Le grand-père avait choisi la mauvaise pioche, en décidant de mourir ici.

Enjambant le bambin qui se frottait le crâne en retenant ses larmes, le grand homme se baissa pour hisser avec un effort non dissimulé le corps du vieillard ses épaules. Il se retourna ensuite sans adresser un regard à cette détestable foule, entamant sa marche lente vers le cercueil de bois noir qui les emmènerait tous deux loin de cette île. Si son chargement ne donnait pas signe de vie d’ici là, ou du moins si le fossoyeur, fredonnant son air funèbre, ne le remarquait pas, il serait déposé avec tout le soin dont était capable l’Ours dans l’embarcation de fortune, avant que celle-ci ne soit mise à flots.

Car Eden Chapter avait eu tout ce qu’il avait besoin d’avoir sur son nouveau client. Son amour indescriptible pour sa famille ne laissait aucun doute : pour cet enterrement-ci, exceptionnellement, le plus important ne serait pas le « comment ». C’était bien le « où » qui était primordial.

Son devoir était donc plus qu'évident. Il partait pour Toroa.








Que d’aventures ! Surprised Où ira-t-on maintenant, avec « Larbin », « Coma » et « Miracle » ?

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Deux vieux ! Mots en folie !



La foule s'éloignait des deux énergumènes. Devenue silencieuse malgré les quelques pleurs du gamin devenu douloureux du crane, la foule disparaissait au loin tandis que l'ancêtre se retrouvait ballotté par le fossoyeur tel un gros sac à patates. Le coma avait somme toute beaucoup de bon pour le vieillard qui avait trouvé un nouvel allié, et même un ami, qui semblait particulièrement comprendre sa vocation première.

Un chant s'éleva autour de l'ancêtre. Assez sombre, plutôt grave, le Chapter semblait particulièrement doué dans l'éloge funèbre par la musique. Bercé par le porté de corps du vieil homme ainsi que par le chant, l'ancêtre partit plus profond encore dans son sommeil rêveur.

Autour de lui, ses petits enfants dansaient et célébraient la vie, c'en était presque trop beau. Nils contempla alors ses mains pour voir qu'elles comptaient trois doigts à gauche et six à droite : c'était une certitude, il se savait dans un rêve. Souriant grandement : il constata qu'il était sur un navire qui tanguait mollement au gré des vagues. Une douce musique embaumait l'air et ne semblait vouloir s'arrêter. L'ancêtre chercha à modifier quelque peu son rêve sans y parvenir réellement : il ne voulait simplement pas que ça s'arrête.

Soudainement, le ciel s'obscurcit et une immense vague vint cueillir le navire de la famille Gratz. D'un grand élan, le grand-père chercha à réfugier toute sa petite famille au sein de sa cabine mais elle ne faisait que s'éloigner : c'était sa cabine qui s'apprêtait à le happer complètement. Enfin, elle finit par le rattraper et l'enfermer à double tour. Il n'était plus possible de sortir : bloqué dans sa propre cabine, loin de toute sa famille.

Ne supportant plus cette vision d'horreur, le vieil homme fit tout pour interrompre son rêve lucide et s'éveilla en sursaut. D'un coup d'un seul, il leva son corps qui venait d'être placé au sein de ce qui semblait être un espace très clos : le cercueil du fossoyeur.


C'est un miracle !
Un énorme "boum" retentit alors qu'il se cogna contre le haut du cercueil déjà fermé. Sa voix ne pouvait prêter à aucune confusion : il était vivant. Encore faudrait-il que ce soit le cas dans quelques secondes : le pauvre vieillard venait de se rendormir sous le choc. Cette fois ci, une belle bosse poindrait sur le front de l'ancêtre. Une simple douche froide pourrait le réveiller mais le Chapter allait-il rester de marbre face à ce défi ultime de la mort ? Pourrait-il rester impassible face à cet irrespect total que pouvait être l'essence même du travail du masqué ?

C'était sans compter sur un nouveau venu. Sans doute un bandit de bas étage... encore un sale gosse qui cherchait à se servir sur le dos des braves et honnêtes travailleurs. Arborant une verste sombre et une coupe de cheveux bien grasse avec une mèche lui tombant sur les yeux, il chercha à soutirer quelques petits sous au fossoyeur. Après tout, pourquoi ne pas profiter de vieux croulants ?

- Hey le larbin ! C'est 200.000 Berrys si tu veux quitter l'ile... faut payer la taxe coco !





Et c'est reparti après un an si ce n'est plus pour trois nouveaux mots : "Déni", "Toupie" et "Embrasser".

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Lun 2 Aoû - 11:58
Deux vieux ! Mots en folie !


Il y avait des jours comme ça. Des jours où l’on se levait du mauvais côté de la tombe, et où rien n’allait. Où l’univers entier semblait se liguer contre nous.

Ce vieillard horripilant et son refus catégorique d’embrasser son propre sort n’étaient finalement pas un défi qui lui avait été lancé par je-ne-sais quelle volonté supérieure. Ils n’étaient que la continuité logique de cette journée merdique. Il n’avait pas signé pour ça ; il travaillait avec les défunts qui avaient besoin d’être aidés pour rejoindre l’autre côté. Pas avec ceux qui s’accrochaient bec et ongles à leur misérable existence, à l’encontre de toute raison. Qu’il fasse donc. Le grand ours ne pouvait pas être moins concerné. Qu’il reste sur son île, ce vieux débris et son déni, qu’il refuse le cadeau merveilleux qui lui était fait par la Faucheuse. Tôt ou tard, elle reviendrait, et il serait là. Mais cette fois-ci, pas d’éloge funèbre personnalisée, pas de croisière privée en cercueil flottant, pas de service luxueux. Il avait eu sa chance. La sépulture qui donnerait l’accès au repos éternel à la vieille chose fripée serait à l’image de sa vie : le strict minimum. Il ne méritait rien de plus.

Il se retourna, frustré, vers le gamin qui venait de l’alpaguer. Encore un ? Décidément, cette journée refusait de lui foutre la paix… Mais il était déterminé à l’avoir tout de même.

Se redressant dans la petite embarcation qui se mit à tanguer dangereusement, l’ours saisit par les pieds le vieillard avant de tirer dessus à grand peine. Au prix d’un effort surhumain, il pivota sur lui-même, emportant sa charge avec lui, puis la lâcha. Le pas-assez-mort pris les airs, tournant mollement sur lui-même telle une toupie cassée.

Le petit brigand de bas étage n’eut le temps que d’ouvrir la bouche, tandis qu’il regardait la masse de peau pendante qui se dirigeait vers lui. Il fut précipité au sol en même temps que le grand-père, qui l’écrasa de tout son poids.


-Tiens ! Ca doit bien valoir à peu près autant !


Se rasseyant dans son canot qui menaçait de se renverser, il stabilisa tant bien que mal la caisse de bois à l’aide de sa pelle. Puis il commença à ramer. Vers où ? Le plus loin possible.

Loin de cette ville ridicule et ses habitants idiots. Loin de cette journée qui s’acharnait sur lui. Et surtout, loin de ce semi-machabée têtu qui refusait toute forme d’aide. Son tout premier échec.







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