A bord, ou plus exactement à l’intérieur de la baleine-île, Lily trépignait. Elle savait que quelques mètres plus haut, au sein des entrailles du navire révolutionnaire, sa supérieure était en train de combattre pour sa vie sous les yeux et sous la surveillance de personne qu’elle ne connaissait ni d’Êve ni d’Adam. La seule chose qui la rassurait était la présence des compagnons de route de la verte, de ses compagnons à elle aussi. Si Sayara se trouvait là-haut depuis le combat entre les forces révolutionnaires et gouvernementales, elle avait été rejointe par Norok à l’issue de la bataille et au début de l’escorte médicale qu’assuraient encore pour quelques instants Bulle et Lily. Au niveau de la blessure légère du cétacé, les choses n’étaient plus problématiques, le pansement posé par la lancière tenait bon et elle pourrait parfaire son travail à l’aide de la rouge et des hommes du Dog une fois débarquée sur l’île de Shivering.

De temps à autre, l’escargophone de la troupe, situé dans le salon de la Toupex, sonnait ; Sayara tenait la Mikao de l’avancé des soins et de l’état de la patronne. Elle était ainsi passée de la frayeur au bonheur pour finalement retomber dans l’inquiétude et la confiance en ce médecin Okama inconnu. En parlant d’Okama, la brune avait appelé une tierce personne pour le tenir au courant de la situation : Bonnie-chan. L’impératrice masculine de l’île de Momorio avait alors appris que sa conseillère particulière avait été passée à tabac par un homme en qui elle avait confiance. Immédiatement, le Vice-Amiral Ghetis Archer avait été blacklisté de la seconde île des femmes et serait pris en chasse à la moindre intrusion sur le territoire. Ils ne pourraient peut-être pas faire grand-chose face à lui mais ils ne pourraient pas entrer en relation avec cet homme, au moins avant d’avoir eu le débriefing de la principale intéressée. Bonnie avait encore appris que le praticien en charge de la santé de l’ex-mouette était apparemment un membre de sa communauté. L’Okama en chef avait alors proposé d’accueillir pour quelques temps cet illustre inconnu en remerciement du service rendu à la chasseresse verte, proposition qui serait alors rapporté à l’invité au moment de l’arrivée à l’hôpital.

Sur le navire du Kevold, les choses ne bougeaient pas énormément. L’état de santé de la Toupex, stabilisé à l’issue de la bataille navale se dégradait petit à petit sans pour autant connaitre de chute féroce : elle tenait bon, tout simplement. Dans cette configuration, elle ne pouvait rien faire d’autre qu’attendre et serrer les dents en espérant que l’embarcation arrive le plus vite possible sur cette île de North Blue. S’agissant de la douleur, celle-ci revenait par vague pour venir maltraiter le corps de l’anciennement colonelle et notamment cette épaule gauche où l’Archer avait particulièrement insisté. Le médecin semblait réussir à préserver le membre lésé mais une exposition trop longue à une absence de soin plus approfondis pourrait très clairement endommager la zone de façon plus permanente. Il ne restait donc à espérer que les blessures n’arrivent pas à ce stade.

Sombrant peu à peu sans perdre totalement conscience, état probablement dû à la perte de sang, la belle gardait sa main droite sur le côté de la table d’opération ; endroit où Norok se trouvait. La bête nocturne avait plié le coup pour que la fourrure présente au niveau de son coup touche la main de sa maîtresse. Très clairement, Norok s’inquiétait et cela se sentait, même pour quelqu’un qui ne connaissait pas l’animal. D’un autre côté de la table, au-dessus de la tête de la verte, se trouvait Sayara dont le regard ne quittait pas celui de sa supérieure. Elle essayait de lui apporter une aide réelle à défaut de pouvoir lui apporter un soulagement effectif.

Shivering Island était néanmoins en vue et les hommes d’Erwin pourraient aider à la prise en charge, tout était maintenant qu’une histoire de compétence du corps médical présent sur l’île.

Kanäe sentait que les choses se précisaient malgré son état ; Norok avait bougé et le visage de Sayara ne se trouvait plus en face de celui de sa supérieure qui l’avait délaissé pour aller voir ce qu’il se passait en extérieur. De prime abord, la crainte de l’ex-colonelle était celle d’une nouvelle bataille navale qui ne pourrait qu’aggraver son état et retarder encore son arrivée sur un lieu de soin plus adéquat. Elle fut néanmoins bien rassurée lorsqu’elle entendit le sort qui lui était destiné : elle sortait. Un tel ordre annonçait finalement la nouvelle tant attendue : sa prise en charge à l’hopital de Shivering Island.

Au moment où le médecin Okama avait soulevé la belle, cette dernière serra les dents plus que depuis les jours précédents ; la douleur lui enfonça l’intégralité du corps avant de la plonger encore une fois dans l’inconscience. Sayara n’avait pu qu’assister impuissante à ce spectacle destructeur, le veilleur nocturne, fidèle compagnon de Kanäe émettait un feulement inquiet exprimant sa détresse face à l’état désastreux de sa protégée. Impulsive en état de stress, la rouge invectiva la totalité du groupe de transport pour que la révolutionnaire soit soignée le plus vite possible. Puis, se penchant sur la blessée, Sayara ne lui glissa que quelques mots avant de la laisser disparaitre derrière les portes de l’établissement.



La Nokano ne se voyait pas entrer là-dedans et attendrait devant l’hôpital que Blue ou un autre membre de la révolution vienne lui apporter une nouvelle rassurante, refusant totalement de croire que les nouvelles seraient mauvaises. Cajolant Norok toujours inquiet au possible, l’inquiète jeune femme fredonnait un air qu’elle avait entendu dans sa jeunesse, une berceuse qu’elle aimait se chanter lorsqu’elle ne pouvait faire face à la dure vérité d’une situation. Fredonnant dans le vent avec pour seul spectateur Norok, elle attendait.

Bulle refaisait surface un peu plus loin aux abords de l’île, plus proche du village des lieux. De la bouche béante de la baleine-île sortit Lily accompagnée de quelques-uns des animaux de la maudite du scorpion. Arrivant prêt d’un endroit relativement bondé, peut-être un marché ou quelque chose de ce style, la lancière s’adressa au public en hurlant.



Se retournant vers la baleine toujours en-dehors de l’eau, elle fit une signe du doigt en faisant tourner sa main. Directement, le cétacé se retourna et finit sur le côté, nageoire bandé posé sur le bord de mer.



La demande était lancée, il fallait au moins un couvreur professionnel pour s’occuper de ce travail d’importance.

Si la situation de la révolutionnaire verte évoluait peu à peu au sein de la salle d’opération, celle-ci avait été mise sous anesthésie et ne pouvait donc plus suivre l’évolution de son état. Dans cet état de sommeil artificiel, ses songes avaient délaissés son corps pour finalement laisser place à de doux rêves. Dans ses rêves, elle se retrouvait sur l’île de Momorio, accompagnée de ses amis et des personnes qu’elle considérait comme les nouveaux membres de sa famille. La seconde île des femmes était aujourd’hui considérée par la Toupex comme un foyer dans lequel elle aimait revenir et se retrouver ; ne serait-ce aussi que pour la confiance que le peuple travesti avait placé en elle.

Un peu plus bas et à quelques mètres de l’opérée, Sayara et Norok étaient toujours figés devant l’établissement de soin. Si Norok avait préféré céder et sombrer dans le sommeil sous les caresses de la rouge, cette dernière avait changé d’objet d’attention. Ne pouvant rien faire de plus pour Kanäe, la Nokano réfléchissait maintenant au reste de la marche à suivre : que ferait le groupe une fois la cheffe remise ?

Elle savait que le Dog, et plus généralement l’inquisition, avait des ambitions auxquelles l’ex-mouette cherchait à participer activement. Il y avait donc de fortes chances qu’elle se mobilise pour faire avancer les projets de l’organisation qu’elle avait rejointe et s’il fallait attaquer le gouvernement, elle le ferait. Elle avait entendu parler de divers projets : des conquêtes, projets commerciaux ou autres batailles d’importance. Quoiqu’il en soit, elle avait encore quelque chose à faire elle-même, un projet personnel qu’elle ne pouvait oublier. Elle se releva, causant alors le réveil et l’envol de Norok en direction du toit probablement pour faire une sieste, et entra dans l’hôpital. Quelques étages plus haut, devant le chemin d’accès au bloc, elle trouva la personne qu’elle recherchait, accompagnée d’une tiers. Approchant lentement, elle se planta devant le duo de révolutionnaire et attendit que la discussion s’arrête pour elle-même prendre la parole.



Tout moyen de ne plus s'inquiéter et de s'occuper l'esprit était bon à prendre.

Du côté de Lily, les choses avançaient aussi. Elle avait trouvé un semblant de vétérinaire, enfin un étudiant de l’hôpital qui savait faire un bandage et soigner une plaie, ainsi que trois hommes spécialisés dans la couverture des toits de l’île de Shivering Island. Les artisans se vantaient d’avoir été les trois génies qui avaient opéré sur le toit de la mairie mais aussi, de l’hôpital ! Des légendes de l’île selon eux. Enfin, quoiqu’il en soit, la baleine était entre de bonnes mains et les opérations sous bonne direction.



Rien de plus à dire finalement.

Beaucoup plus loin, sur GrandLine cette fois, l’impératrice récemment nommée bouillonnait. Bonnie Bella ne savait pas ce qu’il advenait de sa conseillère et aurait aimé en savoir plus, même s’il n’y avait rien de plus à savoir en l’état. Les autres conseillers, à commencer par Salem, cherchait le numéro de la femme qui s’occupait des relations extérieures de l’inquisition pour avoir des nouvelles mais rien à faire : l’impératrice l’avait perdu.

Depuis la sortie de la Toupex du bloc opératoire, les heures s’étaient écoulées et la journée avait finalement été bien entamée. Le soleil avait tiré sa révérence et avait laissé place à la lune qui commençait maintenant sa lente ascension dans le ciel d’encre de l’île enneigée. Les dernières heures avaient été éprouvantes pour beaucoup à commencer par les membres de l’équipe de la maudite du scorpion. Chacun avait, à sa façon, veillé et pensé à la verte tout en se réjouissant de la bonne nouvelle : elle allait vivre.

Sayara avait entendu la discussion de Blue et du roux mais n’avait pas poussé le sujet, trop heureuse de voir la bouille de sa supérieure franchir les portes de la salle de torture médicale. Elle avait ensuite pris en charge les questions de communication qui ne revenaient pas aux membres de l’inquisition du Dog et avait donc du prévenir Bonnie Bella et Jenna Donahu. L’impératrice de la seconde île des femmes, ainsi la tireuse d’élite en charge de l’île de Goat avaient toutes deux pu apprendre les bonnes nouvelles concernant la révolutionnaire tout en recueillant les inquiétudes des docteurs sur la motricité de son épaule gauche ; particulièrement touchée au cours de son combat contre Ghetis Archer. Cette information avait conforté l’Okama en charge de son peuple sur une position qu’il avait adopté quelques heures plus tôt : le Vice-Amiral de la marine était maintenant « persona non grata » sur leur territoire si spécial. Après les différents appels, la rouge avait retrouvé la chambre de Kanäe et avait veillé sur elle toute la journée durant. Si le Dog était passé, elle ne l’avait pas croisé, mais elle était restée un certain temps en communication avec Bonnie-chan alors peut-être l’avait-elle manqué.

Lily, qui avait quitté le chantier de soin de Bulle plus tôt dans la journée, avait, elle aussi, cheminé en direction de l’établissement de soin et avait assisté Sayara dans les tâches à accomplir. Si la Nokano s’était chargé de la communication extérieure, la Mikao avait pris en charge les explications internes et avait donc exposé la situation à la ménagerie de l’ex mouette. Exercice compliqué, pour ne pas dire impossible lorsque l’on s’adressait à plusieurs reptiles, une chienne, un ours géant et une baleine-île. Quoiqu’il en soit, les animaux avaient compris l’idée et semblaient se réjouir du retour annoncé de leur maîtresse. Une fois la chose faite, elle avait nourri tout le monde avant de retourner auprès de la rouge et de la verte.

Norok eu probablement la journée la plus longue et la plus difficile. N’ayant pas le don de parole, il n’avait pu se distraire en expliquant la situation à telle ou telle personne. La chauve-souris géante avait ainsi passé l’intégralité de sa journée, seule, accrochée à un arbre en lisière de la forêt, tout à côté de l’hôpital. Il avait essayé de trouver le sommeil mais n’avait pu faire face qu’à des cauchemars agités et des rêves particulièrement morbides : le stress et l’angoisse dévoraient aussi bien le sommeil que l’humeur du prédateur nocturne. Si Sayara l’avait également prévenu de la fin « heureuse » de sa protégée, le veilleur n’arrivait pas à se calmer et n’avait au final qu’une seule idée en tête : planter ses crocs dans la chair pourrie de celui qui l’avait mise dans cet état. Il se souvenait parfaitement de l’odeur de Ghetis et espérait plus que tout pouvoir encore la sentir mais plus par le nez : il voulait sentir l’odeur de son sang sur sa langue.

Etrange… et douloureuse. Il s’agissait là des mots qui définissaient au mieux la perception que Kanäe pouvait avoir de son environnement direct.

Elle était restée en sommeil pendant de longues heures. Si elle avait eu la chance de rêver de belles choses dans un premier temps, la douceur avait ensuite laissé place au néant, la plongeant dans un sommeil profond, noir et impersonnel. En cette fin de journée, ou début de nuit, elle commençait à ressentir des choses ; choses qu’elle ne comprenait pas réellement. Elle ne voyait rien, ne sentait rien et n’entendait rien à proprement parlé mais avait une impression étrange de ressenti. Si elle ne les voyait pas, la maudit percevait la présence d’une multitude de personne autour d’elle, des inconnus ou des connus, elle n’arrivait pas à faire la différence dans ce flot épais et ininterrompu de perception.

Sur le coup, l’ex-colonelle de la marine avait conclu à sa propre mort mais cela était impossible. Car si son ressenti était étrange, il était également douloureux. En effet, au moment où ses esprits étaient revenus, elle avait ressenti quelque chose d’incroyablement puissant venir lui marteler le crane : une migraine démentielle s’était installée corrélativement à cette prise de conscience de son entourage. La douleur corporelle qu’elle avait pu éprouver au cours des premiers soins, ainsi que celle qu’elle devait éprouver suite à l’opération n’étaient pas présentes, ou peut-être l’étaient-elles mais surplombées par une souffrance plus intense. Cette migraine l’empêchait de se rendre compte de la véracité de son état physique tout en lui faisant comprendre qu’elle n’était pas morte. En conclusion et à ce moment-là, la Zoan ne comprenait rien mais s’en moquait éperdument ; beaucoup trop occupée et agitée par la douleur mentale qu’elle recevait. Ce supplice empêchait la construction d’idée claire pour ne laisser subsister en elle que des pensées primitives telles que l’envie folle de voir Ghetis souffrir autant ou celle de regret vis-à-vis d’Erwin. Si elle mourrait ou si elle restait dans le coma, le rouquin allait se venger et ce n’était pas une bonne chose pour lui et son mouvement.

Soudainement, devant les regrets qu’elle pouvait éprouver, une présence se distingua dans l’esprit asservi de la blessée : elle croyait avoir perçu Sayara, juste à côté d’elle. Au même instant, ce qui n’étaient jusqu’alors que des présences, se transformèrent en sorte de voix peu audible qu’elle ne pouvait réellement écouter et qui ne firent qu’accentuer les maux de tête dont elle souffrait déjà. Quoiqu’il en soit, et par-dessus le flux douloureux qu’elle percevait, la primée commençait à reprendre une certaine conscience de son corps et de ce fait, ressentit une seconde douleur vive qui concurrençait presque la première. Elle parvint à localiser cette dernière au niveau de l’épaule gauche et savait alors qu’il n’y avait plus de doute sur le fait qu’elle avait finalement survécu. Pestant en pensée contre son ennemi vairon, elle ne put aller plus loin et dresser un réel diagnostic de son état, toujours du fait de cette migraine effroyable. Il y avait là quelque chose de mystique selon elle : l’affrontement d’une douleur corporelle tangible et soignable face à une douleur mentale inexplicable et implacable. Le plus beau dans tout cela était, et ce malgré la souffrance, la prise de conscience de toutes ces présences, de toutes ces voix, qui semblaient hurler et se mélanger pour venir consulter et attaquer l’esprit d’une seule et même personne. Le ressenti de ce pouvoir, s’il était d’une toute autre nature, était aussi puissant, intense et insoutenable que le noir pouvoir du directeur de la prison d’Impel Down. La seule différence était que Kanäe ne repoussait pas ces voix alors qu’elle avait cherché à bouter celles du pouvoir de Satan hors de sa conscience.

Après quelques longs instants de puissants maux de tête l’obligeant à rester dans le noir de son esprit, la verte réussit à retrouver la perception habituelle qu’elle avait du monde et percevait maintenant des couleurs, des odeurs et des sons réels. Ses yeux parvenaient à vaincre l'obscurité de son esprit tout doucement, la sédation laissant place au reveil. Peu à peu, elle retrouvait ses sens et la conscience pleine et totale de son corps. De la même façon, au fur et à mesure, elle perdait cette perception étrange et voyait sa migraine se réduire pour que finalement, ces deux paramètres disparaissent totalement. Si elle avait connu une perception nouvelle, celle-ci ne semblait pas encore prête à se mêler avec le ressenti traditionnel des choses dont pouvait bénéficier Kanäe. Pourtant, une chose apparaissait comme évidente pour elle : quelque chose s’était éveillé en elle.

Contrairement au jour où le haki de l’armement s’était manifesté en elle, l’ex-colonelle n’avait su mettre un mot sur ce qu’elle venait de vivre et de ressentir. Elle savait que l’éveil d’une personne au haki de l’observation causait des migraines mais était à mille lieux d’imaginer que ce phénomène prenait lentement place en elle.

Cette nouvelle aptitude que l'on obtenait souvent au cours de situation dantesque, cherchait donc à émerger chez la Toupex après les récents et multiples chocs que celle-ci avait reçu. Le combat contre Ghetis, l'exposition au pouvoir de Satan, sa trahison et l'affrontement contre les Décimas ; tout ça avait poussé cette énergie nouvelle à enfin prendre la place qu'elle méritait dans ce nouvel être. Il s'agissait par ailleurs du meilleur moment pour cela, car si les idéaux de l'ex gouvernementale étaient clairs, son échange avec Kurohebi lui avait permis de tirer un trait sur l'un des derniers liens qu'elle entretenait avec le gouvernement. Aujourd'hui, la couronne du vairon n'était plus considérée comme alliée, au même titre que les autres équipages de la marine, ils étaient des ennemis.

Devant une telle clarté, cette nouvelle perception apparaissait comme l'étape suivante ; le moyen pour la belle d’émeraude d'avancé encore sur la voie qu'elle avait choisi.

Quoiqu’il en soit, et devant le retour de ses capacités de réflexion, la Toupex nota la présence de Lily et confirma celle qu’elle avait plus ou moins cru percevoir de Sayara. Elle remarqua encore les nombreux bandages, perfusions, et tuyaux en tout genre qui pouvaient pendre de son corps mais aussi et surtout, les courbatures et blessures qui torturaient son corps meurtri.

Consciente de les avoir inquiéter, Kanäe sourit tant bien que mal aux filles et, de sa bouche pâteuse et déshydratée, brisa lentement le silence.



Lily fut bien évidement la première à répondre, restant sur le ton de l’humour elle glissa à sa supérieure que celle-ci n’était pas totalement remise.



Ce fut dans cette ambiance légère et rassurée que les trois jeunes femmes échangèrent un peu avant d’être finalement prête à recevoir une éventuelle visite extérieure.

Pour être tout à fait honnête sur la situation des faits, la Toupex qui recevait de nouvelles visites était encore un peu dans les vapes suite, notamment, au passage douloureux et aux maux de têtes violents qu’elle venait d’essuyer. Elle éprouvait encore des difficultés à totalement se concentrer mais avait su retrouver le sourire à la vue du petit animal jaune et noir qui était entré dans la pièce. Elle regarda la petite bestiole briser l’une des noix offerte par le rouquin en souriant et demanda ensuite à Sayara de lui emmener le petit crabe directement sur son lit.

Dans son état, elle préférait ne pas se lever pour éviter toute chute malencontreuse et aggravé, encore, l’état de son épaule d’ores et déjà bien amoché. La rouge s’exécuta, se saisit du petit être à pince et vint le déposer sur les genoux de la maudite avec son petit paquet de noix. Le nouveau membre de la ménagerie de la Toupex semblait tout à fait à l’aise avec sa nouvelle maîtresse et s’amusait maintenant à briser l’intégralité du paquet de noix sous les yeux attentifs et attendris de l’ex-mouette qui écoutait en parallèle les justifications du rouquin. Puis, vint quelqu’un d’autre : l’homme poisson qui commençait à expliquer à la belle que l’inquisition avait besoin d’elle pour débarrasser une bande de jeunes innocents d’un chef tyrannique. Quand les deux collègues eurent finis leur speech, la Zoan se redressa tout en posant sa main sur la tête de son nouveau petit protégé. Elle se devait d’être la plus « présentable » possible pour pouvoir intervenir sur le terrain de la politique de l’inquisition ; même si les deux personnes présentes devant elle l’avait précédemment vu couverte de sang et dans une tenue peu flatteuse.



Elle marqua un temps de silence tout en regardant tour à tour ses deux amies et compagnes de voyage. Elle déversa encore un peu de tendresse sur le crâne du petit crabe avant de répondre s’agissant de la demande de Blue.



Elle regarda la lancière qui se trouvait à ses côtés pour lui demander où se trouvait d’ailleurs le veilleur nocturne. Cette dernière lui expliqua que Norok attendait suspendu dans un coin que sa protégée se relève et revienne le trouver. Il avait eu peur et se refusait totalement d’entrée dans un lieu où les gens mourraient sans cesse, il avait eu peur que sa propre petite Kanäe ne ressorte pas vivante de cet hôpital. Une fois rassurée, elle reprit pour Blue et l’Amarz.



La gouvernementale était loin maintenant, Kanäe commençait son activité au sein de l’inquisition.

Lily intervint alors, habitée par tous les plus grands préceptes de l’éducation moderne, elle avait une solution à cette situation épineuse de danger infantile.



Si la remarque n’était pas foncièrement fausse dans le fond, la forme laissait à désirer ; comme souvent avec la petite brune d’ailleurs. La remarque entraina un regard désapprobateur de la part de la Nokano et une certaine exaspération chez la Toupex. L’une comme l’autre avait l’habitude de voir passer les lubies et interventions hautes en couleur de la part de Lily mais réagissaient toujours de la même façon face à ces fulgurances. Quoiqu’il en soit, et une fois les hommes sortis, la Toupex mit en place le plan de repérage qui devait être effectué avant toute intervention directe.

La journée avait passé sur l’île enneigée et la nuit était maintenant installée depuis peu, si beaucoup aurait à regretter cet état de fait, pour le groupe de la maudite il s’agissait là d’une excellente opportunité car de nuit ils avaient un avantage de taille. Bien consciente de cela, et connaissant plus que parfaitement l’avantage en question, Kanäe s’adressa à ses comparses pour qu’elles se chargent de la mise en place du plan.



Les ordres étaient clairs, et si Sayara se mit immédiatement au travail en quittant la pièce et en partant à la recherche de la chauve-souris géante, Lily était restée sur place et semblait bien embêtée. Elle avait effectivement oublié de préciser quelque chose à sa subordonnée.



Rouge de colère, la Zoan ne supportait pas que l’on s’en prenne à ses compagnons animaux. Serrant le poing droit, elle perça le regard de sa subordonnée et demanda où se trouvait le salopard qui avait osé toucher à son gros bébé.



Même si cela n’était pas sympathique, Kanäe était heureuse d’apprendre cette nouvelle. Une fois cet épisode bouclé, la brune quitta à son tour la pièce pour enfin laisser la primée seule avec son petite crabe. Ce dernier avait terminé de s’occuper du paquet de noix qui s’étalait maintenant sur une bonne partie du lit de l’ex mouette. Le petit crustacé, passablement intelligent, avait placé les parties comestibles à l’écart du champ de coquille. Il avait ensuite décidé de s’installer au milieu des coquilles pour piquer un petit roupillon. La verte se saisit d’une poignée de noix et en dégusta quelques-unes en regardant l’ouvrier grâce auquel elle pouvait se sustenter. D’un calme apparent, elle souffrait énormément au niveau de cette épaule gauche. Maudissant encore une fois l’Archer, elle réfléchissait à une solution pour effacer cette douleur.

En lisière de la forêt, sous le couvert des arbres le protégeant de la neige, Norok avait enfin trouvé le sommeil. Il ressentait quelque chose : il sentait que sa protégée allait bien. Il fut néanmoins dérangé bien trop rapidement à son goût par une autre odeur qu’il connaissait parfaitement, celle de la femme de la bande à la poitrine généreuse. Ouvrant mollement son œil droit, bien que cela ne serve en réalité absolument à rien, l’animal étant aveugle de naissance comme tous les autres représentants de sa race, il se tourna vers son interlocutrice. Cette dernière lui expliqua les ordres et le laissa ensuite s’envoler en direction du lieu ciblé par les membres de l’inquisition. Elle avait donné pour consigne supplémentaire à Norok de ne pas entrer en conflit, de rester caché dans le voile de la nuit et de venir faire son rapport à la fenêtre de Kanäe une fois son repérage terminé.

L’ailé prit alors le chemin du ciel et la direction de la montagne désignée pour débuter ses recherches. Dans la nuit, le prédateur noir était presque invisible, il ne risquait donc pas d’être repéré tant qu’il volait à une hauteur satisfaisante. Son sonar lui permettait de se repérer et d’avancer avec sécurité et facilité, il lui permettrait également de trouver relativement facilement toute personne se trouvant dans la montagne. Pourtant, après une heure de vol, ce ne fut pas son sonar qui lui servit en premier mais son odorat. Le prédateur avait en effet senti une odeur de feu, cette odeur si particulière de bois brûlé excitait les sens du chasseur qui savait maintenant vers où se diriger.

Suivant la piste olfactive dénichée plus tôt, il arriva rapidement au-dessus de ce qu’il percevait comme un attroupement de personne autour du feu. Il ne pouvait pas savoir si les personnes en question portaient des sandales ou étaient tatoués mais il ne pouvait ignorer la présence de ce groupe de petit être au milieu de la zone qu’il devait ratisser. Gardant en mémoire la position de l’endroit. Il fit rapidement le chemin inverse en direction de l’hôpital pour avertir ses compagnons.

Plusieurs heures avaient passé maintenant et la verte s’était laissée tomber dans les bras de Morphée, de même que Sayara qui était de retour dans sa chambre. Lily passait quant à elle la nuit dans l’estomac de Bulle, avec la ménagerie de l’équipe. Ce fut dans ce contexte que la bête vint se poser sur la rambarde anti-suicide de la fenêtre de la maudite, donnant des coups de tête sur le verre pour prévenir de son arrivée.

Avant même qu’elles se réveillent, et ne puissent ouvrir la fenêtre, la puissance non-mesurée de Norok vint briser le verre en question. Apparemment, Erwin allait devoir rembourser une fenêtre au Kevold. Le bruit du verre réveilla les deux acolytes qui virent alors avec joie la bouille légèrement terrifiante pour le commun des mortels de Norok. S’en suivrait donc bientôt une discussion entre l’Homme et la bête dans laquelle les deux femmes allaient s’évertuer à comprendre ce que l’animal avait découvert.

Ce fut à l’issue d’un concerto de feulement, de cris stridents, de signes de tête difficilement compréhensibles et autres éléments du langage corporel d’une chauve-souris géante que la Toupex et Nokano parvinrent à déchiffrer une bonne partie du résultat du repérage expliqué par le gentil Norok. Cela donnait donc au final quelque chose comme : « Il y a des gens dans la montagne, un grand groupe composé de pas mal de petits humains et d’un humain moins petit. Il y avait aussi une odeur bizarre avec le feu que je n’aime pas mais que je n’ai pas reconnu ».

Le lecteur comprendra à ce stade que Kanäe, depuis longtemps en compagnie de son ailé partenaire, avait une bonne compréhension de la langue mi-gutturale, mi-stridente du veilleur nocturne.

Quoiqu’il en soit, l’odeur que Norok n’avait pas reconnue était celle des explosifs que les gamins étaient en train de mettre au point au moment de son survol de la zone. Et d’ailleurs, même s’il l’avait reconnu, il y avait de fortes chances que le groupe de traductrice ne puisse comprendre ce terme précis, même si Sayara était une professionnelle en la matière. Suite à l’explication qui avait pris un temps non-négligeable, la verte envoya la rouge réveiller la brune et rapporter les faits à la personne qui s’occupait de l’administration de l’île : le Kevold. Faisant d’une pierre deux coups, elle envoya également Norok du côté de la montagne et de sa forêt avoisinante dans le but de surveiller l’avancée des tatoués ; même si elle ignorait alors que leur chef était également à leur côté. Pour elle, « l’humain moins petit » devait être un cadre ou un ado du groupuscule criminel.

Esseulée, et pour l’heure inactive, la belle réfléchissait au moyen de récupérer ces petits sans leur faire de mal dans l’éventualité où ces derniers émettraient une résistance. La persuasion était son premier plan, sa priorité ; à défaut la sédation par poison semblait une solution acceptable mais il faudrait par la suite rééduquer les enfants et s’assurer de leur bonne croissance. S’il ne faisait pas de doute sur la volonté d’Erwin et de Blue de sauver les gosses, il fallait que les habitants de l’île suivent ce crédo ; quitte pour eux à accepter l’un de ces gosses dans leurs foyers. Une sorte de famille d’accueil en somme.

Quelques dizaines de minutes passèrent ainsi jusqu’à ce que Kanäe ne commence à bouger. Elle n’en pouvait plus de rester assise, son épaule la lançait, sa vessie la titillait et la situation de l’île l’inquiétait. Blue était absent, selon Sayara le Kevold avait un niveau inférieur à la grenouille et à la chasseresse verte et aucun autre membre cadre de l’inquisition n’était présent, enfin à ce qu’elle en savait Ce rôle d’organisatrice lui revenait donc finalement, malgré ses blessures et ses maux. Elle appela deux infirmières pour que celles-ci l’aide à se rhabiller, puis un médecin pour qu’il puisse fixer son bras à son corps au moyen d’une écharpe. Ce dernier n’était d’ailleurs pas d’avis que la blessé sorte mais n’avait pas vraiment le choix face à l’insistance de la principale intéressée.

Enfin, ce fut Lily qui arriva dans les environs pour annoncer une excellente nouvelle à l’ex-mouette : Léon son lézard géant et moyen de transport occasionnel l’attendait devant l’établissement de soin. Cette nouvelle rassura le médecin qui s’inquiétait de la faculté de Kanäe à marcher longtemps. Il transmit ensuite une poche d’antidouleur de rechange à la lancière qu’elle devait placer en amont de la perfusion que la Zoan se trimballait au bras gauche. Initialement placée sur le droit, elle avait insisté pour que cela soit changé. En cas de combat, elle se devait d’avoir un bras droit libre de toute entrave, ne serait-ce que pour balancer des lames d’air depuis le dos de son fidèle Léon.

Tout ce groupe l’aida à parvenir à sa monture qui attendait devant la porte de l’hôpital où elle attendrait le retour de Sayara et, elle l’espérait, l’arrivée de l’épéiste rouquin.

Alors qu’elle raccrochait son escargophone après reçu l’appel du Kevold, Kanäe se retourna vers Lily, Sayara arrivant en courant à l’hôpital, affolée. Elle aussi avait entendu les nouvelles et s’était donc dépêchée de rejoindre sa supérieure et son amie lancière. Elle fut néanmoins étonnée de retrouver la chasseresse verte en extérieur, sur son lézard géant avec une perfusion pendante au bras gauche. Elle ne fit cependant aucune remarque et resta concentrée sur la situation de crise qui s’étalait maintenant devant eux. Norok, lui aussi, revenait au-dessus de sa maîtresse depuis la ville, il semblait affolé par quelque chose et hurlait à la mort pour attirer l’attention de la Toupex qu’il ne prenait même pas le temps de lécher ; par joie de la retrouver.

Cette attitude entraina un sentiment de danger chez l’ex-mouette qui savait que les instincts de son prédateur préféré se vérifiaient souvent. Il fallait donc agir, agir vite et surtout, agir sur tous les plans. Les bombes de Sayara et son expertise n’étaient maintenant plus utiles, si les gosses décidaient d’appuyer sur le bouton, c’était terminé.



Sans attendre, tous se divisèrent et se mirent en route vers leur zone d’activité, Léon, la monture de la belle, suivait maintenant le prédateur nocturne dans une direction inconnue, Sayara allait vers ce qui faisait office d’hôtel de ville dans le coin en espérant que se trouvait là-bas un système de communication pour l’intégralité de l’île alors que Lily passait de rue en rue pour chercher les enfants du gang. Elle avait pour ambition de parler aux gamins, et si cela ne suffisait pas, elle les assommerait à coup de hampe de lance, leur ôterait les explosifs ou les immobiliserait.

Après une filature de plusieurs minutes, la Toupex et sa monture arrivèrent devant un grand bâtiment au style remarquable et furent rejoint par Norok qui se posa à côté de sa protégée. Il montrait les crocs tout en regardant vers la l’intérieur du bâtiment en question, comme si une menace directe s’y trouvait. En réalité, au cours de son survol de l’île, le prédateur nocturne avait entendu le cri du chef du gang Hermes. Il avait suivi l’adulte depuis la séparation du groupe en provenance de la forêt et s’était finalement retrouvé aux premières loges pour assister à la prise d’otage du criminel.

Le problème en l’occurrence était le fait que Kanäe n’était pas en pleine possession de toutes ses capacités et toute infiltration discrète lui était tout à fait impossible ; elle ne tenait qu’à peine de bout, alors se faufiler était à exclure. Elle demanda donc à Léon d’avancer en direction de la porte et de Norok de survoler le bâtiment, de trouver un point d’entrée avec vision sur l’ennemi et d’attaquer au moment où il aurait une zone dégagée.

Le lézard géant avança donc vers les portes qu’il défonça d’un grand coup de queue. Il pénétra alors dans les lieux sous le regard du preneur d’otage et de tous les autres occupants des lieux. La Toupex se devait de gagner du temps pour que ses alliées puissent désamorcer le danger que représentaient les bombes attachées aux enfants. Elle s’adressa donc à son ennemi très rapidement après son entrée fracassante.



Sa main droite, seule main valide en l’état se trouvait sur sa cuisse, juste à côté de sa lame qu’elle dégainerait pour envoyer une lame d’air si le preneur d’otage tentait un tir sur quelqu’un ou s’il essayait d’attraper un détonateur.

Elle voulait, avant toute autre chose, ouvrir une fenêtre de tir à son compagnon ailé. Il viendrait vite planter ses crocs dans la chair de l’homme au niveau de l’épaule et ainsi l’empêcher d’agir.

La balle tirée par le hors-la-loi n’entraina aucune réaction chez la Toupex qui avait vu le projectile passé à quelques centimètres de sa tête. Et alors que s’attendait à une possible négociation elle dut subir un début de monologue ennuyeux qui, heureusement pour sa santé mentale et physique, s’acheva assez rapidement. Cependant, devant la suite des événements, elle aurait préféré subir un monologue interminable et pouvoir négocier après que devoir blessé un pauvre gosse qui n’avait rien demandé à personne.

Ne pouvant se permettre de la tuer ou de le blesser de façon trop importante, Kanäe décala sa main qui se trouvait sur le pommeau de son sabre pour saisir et envoyer en direction du gamin un des seringues à injection automatique qui trônait régulièrement à sa ceinture. Le contenu de cette dernière se déverserait ainsi en intégralité au moment où le projectile entrerait en contact avec la zone visée, à savoir la cuisse gauche de petit pyromane. La substance en question était l’un des produits fait-maison par la nouvellement révolutionnaire et qui avait pour but d’envoyer l’empoisonné dans un monde de rêve ou de cauchemar. Le poison qu’elle avait logiquement appelé « Sommeil » allait faire effet plus rapidement et empêché le gamin d’atteindre son but. Toutefois, s’il s’en approchait trop et faisait preuve d’une certaine résistance face au poison, la verte décocherait une lame d’air de faible intensité dans sa direction pour le repousser et le faire chuter.

Une fois cette situation réglée, l’ex-mouette pourrait en revenir à sa principale préoccupation : Hermès et ses otages. Détaillant un peu plus les forces en présence, la maudite nota rapidement que d’autres enfants du gang étaient présents et ne pourrait s’amuser à tous les empoisonner ou tous les repousser à coup de lame d’air dans son état actuel.

Devant ce constat alarmant, elle dut prendre une décision d’urgence qui mettrait, encore une fois, son corps un peu plus à l’épreuve. Alors qu’elle se saisissait de la poche attachée à son bras invalide pour la caler dans sa ceinture, Kanäe lança sa jambe gauche pour descendre de sa monture actuelle : Léon le lézard géant. Norok avait alors disparu de la zone et se trouvait probablement derrière une fenêtre, prêt à bondir sur sa proie ou sur un gamin un peu trop proche de l’irréparable. S’il s’agissait de cette dernière hypothèse, le veilleur nocturne se devait d’attraper l’enfant par les pattes, de l’emmener dans les airs et de le déséquiper à l’aide de ses canines.

Une fois au sol, la Toupex récupéra donc une petite pilule se trouvant dans une boite au chaud dans sa fidèle sacoche et la porta à sa bouche, elle devait améliorer son état l’espace d’un instant pour améliorer la situation. Elle sourit en regardant son adversaire et vint enfin à répondre à sa question provocatrice.



Une fois sa réplique terminée, elle croqua la pilule qui libéra son effet actif dans l’organisme de la Zoan. La « Poison pill » modèle inhibition permettait à son utilisateur de ne ressentir aucune douleur physique pendant un certain temps, temps plus que limité pour Kanäe qui était déjà largement droguée par les produits hospitalier. En principe, elle n’utilisait que rarement ses confections car savait que les contrecoups étaient assez violents mais elle n’avait plus trop le choix.

Libérant ensuite son bras gauche sans grimacer, la douleur n’étant plus ressenti, Kanäe attrapa son sabre et commença par déterminer la position de chacun des gamins. Il n’y en avait pas tant que ça mais suffisamment pour que cela représente un danger réel. Devant cette situation, la maudite regretta de ne pas avoir fait venir Lily avec elle, mais il était maintenant trop tard. Elle décida de jouer le tout pour le tout et transforma son corps pour prendre une forme hybride basique et planter son dard dans le sol. Contractant sa queue au maximum, elle libéra la tension d’un coup et fonça à toute allure vers le principal ennemi, lame dégainée, prête à trancher.

Si un des gosses, ou plusieurs d’entre eux, bougeaient, elle enverrait un pic d’air avec son dard pour l’envoyer dans les vapes et compterait en soutien supplémentaire sur son fidèle Norok. Pour l’heure néanmoins, elle comptait bien découper le chef du gang.

Lily avait dans un premier temps prôné la gentillesse et essayait de résonner les enfants. Devant de multiples et cuisants échecs, elle avait fini par modifier sa stratégie et optait maintenant pour un désarmement complet à l’aide de sa lance et un envoi des gosses sur les forces armées du Kevold qui s’occupaient de les mettre hors d’état de causer plus de mal.

Sayara continuait à chercher un moyen de communication, en vain pour le moment. Lorsqu’elle croisa un enfant, elle se chargeait de lui avec toute la douceur qui la caractérisait ; usant d’encouragements pour l’avenir et de promesses de jours meilleurs.

L’esquive était magistrale, imparable et élégante, enfin presque. Quoiqu’il en soit, la verte était totalement prise de court et n’avait pu envoyer un coup d’épée dans le ventre de l’esquivant. Rien à faire, elle était passée comme une fusée sans pouvoir infliger un seul dommage.

De plus, à peine remise debout, elle avait dû faire face à la riposte de cette personne horrible, de ce profiteur ; pire : de ce tortionnaire. Elle-même devant maintenant passé à la place de la victime et encaisser le coup de l’ennemi, car oui elle ne pouvait plus esquiver. Insufflant son haki de l’armement au niveau de son avant-bras droit, elle fut alors étonnée de voir cette zone se couvrir de cette plaque caractéristique. Pour elle, c’était une première, jamais son haki ne s’était manifesté de façon tangible, venant ainsi la protéger des agressions extérieures. En plus de cette première barrière, la belle pouvait encore compter sur sa carapace de scorpion qui permettrait une meilleure absorption du choc.

Quoiqu’il en soit, l’affrontement entre le pied et le bras des combattants fut rude et se solda par ce que l’on pouvait plus ou moins résumer en un match nul. Le deux allaient se retrouver l’un en face de l’autre comme deux débiles chacun prit par la force de l’autre. Ce qui faisait bouillir intérieurement l’ex-mouette était le fait qu’elle se sentait plus forte que lui en temps normal mais aujourd’hui sa faiblesse physique la rattrapait. Fumier de Ghetis… Sans son intervention, le combat aurait sans doute été plié beaucoup plus vite. Cependant, devant faire face à ses problèmes, la verte ne baissait pas les bras et devait affronter cet homme au mieux.

Pour repartir au mieux, Kanäe se recula et débuta un mouvement ample de lame dans le but d’envoyer une puissante et large lame d’air sur son ennemi. Malgré tout, au milieu de son mouvement, le sabre de la maudite tomba au sol, lâché par sa propriétaire. Cette dernière était maintenant au sol, à genoux, les mains plaquées sur les tempes, et ne comprenait plus ce qu’il se passait autour d’elle. Le mal de crâne qui l’avait touché quelques heures plus tôt venait de réapparaitre avec une fureur incroyable. Plus encore qu’à sa première occurrence, les maux de tête la torpillaient totalement. Le haki se l'observation qui s'éveillait seulement chez la chasseresse choisissait donc ce moment de difficulté pour se laisser aller. La situation, si elle n'était pas totalement, désespérée, était quand même très mal engagée... Kanäe était en position de faiblesse depuis le début et savait que ses chances de victoire étaient faibles. En réaction à l'urgence, le fluide perceptif de la verte s'était manifesté et venait d'anéantir toute chance de succès.

La peu de lucidité qui l’habitait encore se demandait comment la douleur pouvait l’atteindre malgré la pilule d’inhibition qu’elle avait ingéré. Plus encore, la douleur était telle que la verte eut l'impression que son cerveau allait exploser. La détresse et la peur des otages se déversait maintenant dans son esprit ouvert mais totalement incontrôlable. Elle n'entendait pas de voix mais ressentait l'existence de ces personnes.

Perdu au milieu de toutes les présences qu’elle ressentait, de ce flot de détresse et la puissance de sa migraine, elle ne pouvait plus combattre et se trouvait maintenant à la merci de son adversaire. Elle pouvait au mieux se laisser rouler sur le côté pour éviter un dernier coup mais rien de plus.

Devant la scène, Norok se rua dans le bâtiment, éclatant une fenêtre, mâchoire grande ouverte, prêt à agresser l’ennemi de sa protectrice si personne d’autre n’intervenait avant.

Si les choses s’étaient calmées, si l’alliance révolutionnaire portant la marque de l’inquisition avait réussi à éviter le pire tout en préservant l’intégralité des vies humaines présentes sur l’île, la maudite du scorpion souffrait toujours et encore du mal qui la rongeait. Sa vie n’était certes plus en danger du fait de l’intervention de l’homme-grenouille et son adversaire avait été mis hors-course par l’intervention de l’okama mais le mal de crâne qui avait fait irruption en elle devant l’urgence n’avait pas encore laissé sa victime tranquille. Plus qu’une migraine normale ; celle-ci était extrêmement violente, avait été particulièrement soudaine et causait chez la verte un sentiment insondable et profond. Elle ne percevait rien de précis, n’entendait rien de distinct mais avait cette impression horrible qu’elle avait déjà ressenti plus tôt à l’hôpital ; au moment de son réveil.

Ainsi, toujours à genoux au sol, la tête entre les bras, elle fut totalement incapable de bouger ; et, plus étrange encore, de crier. Sa douleur la torpillait et si elle ressentait une douleur atroce, elle n’arrivait pas à hurler comme elle aurait pu le désirer. Cette scène silencieuse et difficile à soutenir commença cependant à décliner après quelques longues minutes de souffrance pour la Toupex. En effet, son épaule gauche commença à la lancer très fortement : signe que sa pilule d’inhibition ne faisait maintenant plus effet. Lorsque cette seconde sensation de douleur réapparut, Kanäe baissa le bras pour s’en soulager en partie. Retrouvant de la mobilité, elle se rendit alors compte que la migraine avait disparu ; comme-ci cette douleur physique l’avait encore extirpé de la douleur mentale ; ou quelque chose comme ça… Le retour à la normale avait été presque inconscient.

Regardant autour d’elle, elle vit que tout allait bien, que les équipes médicales du Campbell commençait à prendre en charge les enfants et les différentes victimes de la prise d’otage. Se relevant ensuite d’elle-même, elle plaça son bras dans sa ceinture pour atténuer la douleur vive qui avait pris le relai et se dirigea en direction de la sortie, là où se trouvait en principe les cadres d’Erwin : Blue, Pita et Camille. Elle eut finalement la désagréable surprise de voir son fidèle Norok, au sol, pris en charge par des médecins, ou des vétérinaires probablement.

Alors qu’elle cherchait à s’élancer vers ce groupe, elle fut retenue par la main douce mais puissance de Sayara. Se tournant vers elle, elle retrouva les visages familiers de Lily, de la rouge, Blue, Pita et Camille qui semblaient superviser le retour à la normale des choses. Immédiatement, la Nokano informa sa supérieure que leur veilleur nocturne avait subi un bon choc mais qu’il n’y avait rien de grave pour la suite.

Quelques dizaines de minutes plus tard, cela se confirma lorsque Norok se remit sur ses pattes et déploya lentement ses ailes ; preuve que tout allait bien à ce niveau-là aussi. Rassurée, la maudite put enfin reprendre le fil de ses pensées et surtout, penser à la suite. Elle précisa donc à Blue qu’une fois remise, elle comptait partir pour West Blue et se rapprocher d’Eken Sor. Aux dernières nouvelles, la révolution de West Blue avait besoin d’un petit coup de main et son intervention permettrait de solidifier les relations entre la révolution du Dog et celle du Sor. Cette épaule continuerait probablement de l'asticoter mais se remettrait toujours plus avec le temps ; en tout état de cause, elle ne pouvait de toute façon rien y faire.

Au final, tout se terminait pour le mieux et la prise en charge de la verte avait été menée avec une main de maître. deux ombres au tableau : la persistance de la blessure et ce mal inexpliqué qui habitait dorénavant la Zoan. Elle avait bien pour ambition d'en trouver la cause et en parlerait sans doute à Pita avant de reprendre la mer en direction d'une Blues différente.